Liguria Express

Une heure de circulation saturée, une quarantaine de kilomètres plus au sud et moult tunnels plus tard, nous arrivons à notre hôtel.
Juste le temps de poser les bagages dans les chambres avant de passer à table. Le menu est simple, mais convient très bien à la meute affamée qui l'engloutit sans rien trouver à redire sur le manque d'équilibre diététique.
La soirée est courte, en bavardages en terrasse, dans la tiédeur du soir.
A 22h30 sonne le couvre-feu pour nos Frenchies. Et pas de chance pour la "dream team", les "loulous" et les "louloutes", le hasard a bien fait les choses : il les a regroupés dans un coin de couloir et surtout m'a affectée une chambre de laquelle, tête posée sur mon oreiller et porte entrebâillée, j'ai vue sur leurs 3 portes de chambres. Les quelques essais de sortie ont été vite et vertement douchés, foi de Wap à la réputation bien assise de ce côté.
Par contre, pour le petit groupe de jeunes Italiens qui occupe le 1er étage, commence une longue nuit très agitée, faite de portes qui claquent, de cavalcades dans les couloirs, d'éclats de rires et de voix... jusqu'à plus de 2 heures du matin... Mais où sont et que font leurs profs ?! C'est bien la question que le responsable de l'hôtel leur posera le lendemain...

Un voyage scolaire de lycée hôtelier ne peut se faire sans découvrir le terroir. Que trouve-t-on en Ligurie ? Certes, des vignobles, mais avec bon nombre de mineurs dans la meute, la question est réglée sur ce point. Une oliveraie, voilà une bonne idée ! C'est en tout cas, l'idée validée par l'équipe organisatrice.
Et ce matin, après un saut de puce d'une dizaine de kilomètres encore plus au sud, nous arrivons à la coopérative Olivicolotori Sestresi qui nous assure une visite guidée des locaux de production de l'huile d'olive, très instructive, une petite dégustation de leurs produits de qualité (je vous annonce qu'il y a pesto... et pesto !) et un passage en boutique des plus lucratifs pour le collectif de producteurs. Seule la balade dans l'oliveraie a été annulée, la faute aux sols très boueux suite aux pluies des dernières semaines.
www.olivicolotori.net

Le beau temps insolent au lever a laissé place à des nuages menaçants, qui ont eu la bonne idée de pleurer pendant que nous étions en "conférence". Le vent en bourrasque semble vouloir maintenir un équilibre précaire plutôt sec... pourvu que cela dure !

Quelques tours de roues et ronds-points plus tard, le car nous dépose au niveau du Parco Mandela, tout neuf, très agréable et fonctionnel, pour lâcher la meute pour le pique-nique. Il y a de l'espace et quasiment personne, des bancs, des sanitaires et un point d'eau, et même un distributeur de café... et de quoi occuper de façon surprenante nos grands enfants.

Vient l'heure de démarrer notre Randonnée avec notre guide italien francophone, Marco.
L'objectif est de faire une boucle sur la Pointe Manara pour découvrir, je cite le topo, "les caractéristiques géologiques, botaniques et anthropiques du paysage côtier ligure classé au patrimoine mondial de l'UNESCO". Je ne sais si tous ces points ont été abordés par le guide : un troupeau de 60 têtes, ça s'étire long sur un sentier boisé et je suis le serre-file officiel.
70 mètres de point culminant, 2 heures de marche annoncées, ça râlait au départ. Mais finalement, les râleurs, je ne les ai pas vu trainer dans le gruppetto mêlant marcheuses entrainées sachant apprécier tranquillement le temps et l'espace, photographes prenant le temps de leurs clichés et néophytes de la randonnée (hé oui, ça existe à cet âge là !) qui ont vraiment apprécié l'expérience. La pharmacie est restée au fond du sac, comme les vestes de pluie, le volume d'eau s'est révélé quelque peu insuffisant et les pieds ont bien chauffé dans les godillots.





A l'arrivée dans la Baie du Silence, le quartier libre est donné à tous pour une bonne heure trente. Certains continuent à allonger les kilomètres en arpentant les ruelles sympathiques de la ville, d'autres se posent rapidement à diverses terrasses pour quelques boissons rafraichissantes, plusieurs goutent de la mer fraiche aux pieds. Le quatuor de profs, plutôt habituellement voyageurs et randonneurs, curieux de découvertes que nous sommes capitule vite, prend plaisir à libérer les pieds de leurs godillots, à les rafraichir dans l'eau et à s'hydrater le gosier également. Une bien belle pause dans cette baie tranquille en cette fin d'après-midi.



De toute évidence Sestri Levante mériterait que je revienne la découvrir plus pleinement et longuement... hors période estivale, mais à cette saison du printemps encore raisonnablement fréquenté.

Le chauffeur du car ne semblant pas plus habile avec son véhiculo extra longo (à sa décharge, les ruelles des villes italiennes ne sont pas adaptées pour !) que son gps, le kilométrage parcouru en ce jour est encore allongé, pour le rejoindre, de plus de 2 km... et ça chiffre : les doudous-à-tout-faire électroniques ont affiché plus de 13 km le soir (après la virée nocturne) !

C'est très rapidement et par la côte que nous rejoignons notre hôtel où un repas consistant et à peine plus équilibré que la veille nous attend. Il n'y a pas que chez les encadrantes quadra que le manque de crudités commence déjà à se faire sentir...
Mais les esprits sont surtout occupés par la suite des réjouissances : l'absence d'incidents au cours de ces deux premiers jours et la nuit précédente calme ont permis à nos chères têtes blondes, brunes et rousses, de se voir offrir un "after" dans LE bar de la localité...
et même avec l'autorisation pour majeurs et mineurs ( ne le dîtes pas aux parents !) à UNE (et pas une de plus ) bière.
Imaginez l'effervescence !

La fatigue ? La légère déshydratation de l'après-midi ? Autre chose ? Quoi qu'il en soit, une céphalée très rapide à s'installer m'oblige à décliner l'invitation, à laisser mes collègues encadrer la troupe sans moi pour cette virée nocturne. Je veux éviter un lendemain migraineux qui serait très très difficile à gérer, et commence par prendre un acompte d'1h30 sur ma nuit.
J'ai bien fait : la suite ne sera pas bonne, très hachée. Et ce ne sera pas entièrement la faute aux "louloutes" qui, malgré un retour au-delà de minuit, c'est-à-dire une heure plus tard qu'initialement prévu, font la fiesta dans la chambre voisine et tentent des sorties, pourtant silencieuses, en couloir jusqu'à 2 heures du matin...
Quant aux jeunes Italiens, couchés peu après moi, cette nuit, on ne les a pas entendus !  

Vendredi : Cinque Terre !

Les yeux se font petits et pochés et les gestes plutôt ralentis ce matin malgré la jeunesse...
Au-delà du petit-déjeuner tôtif et obligatoire, de la nuit donc courte à très courte, il fallait pour certains prendre une bonne marge pour pouvoir boucler les sacs et remettre la chambrée d'équerre avant l'inspection sans concession. Ils savaient à quel trio féminin rigoureux ils avaient à faire face !

Il est à peine 8h30 quand le car sort du parking, et nous nous félicitons d'être à nouveau légèrement en avance sur le planning annoncé.
La route vers le sud n'est pas plus fluide que les derniers jours, entre replis apennins et congestion matinale, et la troupe s'éveille doucement.
Ce qui n'était qu'en sourdine au cours des trajets précédents prend ce matin un niveau sonore plus affermi... Et lorsque les très jeunes comprennent que leur musique de réveil convient bien aux quadras, les fait même danser et chantonner, c'est tout le car qui pulse aux rythmes et sonorités des années 80. Ils sont décidément surprenants et ont de bons goûts musicaux ces petits ! Ou en tout cas, les DJ du jour, reliés avec leurs doudous-à-tout-faire à la même petite enceinte pas plus volumineuse qu'une petite bouteille d'eau, ont su envoyer une bonne programmation.

Grâce à cela, la bonne humeur est installée et nous permettra de supporter presque avec le sourire la dépose excentrée par notre chauffeur, à nouveau mis en difficulté dans les rues de La Spezia, et les 20 minutes de marche rapide non prévues pour rejoindre la gare ferroviaire.
Même pas le temps d'attendre, nous avons un train qui part dans à peine plus de 5 minutes. C'est l'occasion de constater l'efficacité des quelques-uns qui, en moins de deux, distribuent les 60 tickets, repèrent les composteurs, aiguillent les un(e)s et les autres, répètent et serinent les consignes de montée et de descente, veillent à ne perdre personne et permettent à la troupe d'être installée dans deux wagons contigus. Pour peu, il n'y aurait presque plus besoin de profs...

Les Cinque Terre, ce ne sont pas cinq terres, mais 5 villages.
Accrochés à flanc de falaises au-dessus de la Méditerranée avec leurs cultures en terrasses et leurs maisons-tours aux chaudes couleurs, réunis dans un parc national protégé, accessibles essentiellement par train ou à pieds sur sentiers.
Riomaggiore, Manarola, Corniglia, Vernazza et Monterosso al Mare.


A peine 5 minutes après avoir avalé goulument la meute à La Spezia, les deux wagons la vomissent sur les quais de Riomaggiore.
Une heure d'arrêt pour la joyeuse troupe !
"D'arrêt", il faut vite le dire ! Parce que cette heure est destinée pour nos ados à grimpouiller les rues-rampes montant et traversant le village, accoster des gens, locaux, institutionnels et touristes, pour les interviewer sur les méfaits du tourisme de masse aux Cinque Terre... tout en profitant du paysage maritime, montagnard et villageois... Pas le temps de s'arrêter guère plus de quelques secondes à chaque endroit, donc.
Le quatuor d'encadrants, déjà fatigué ou plutôt cherchant un peu de solitude, grimpouille un peu avant de s'installer à une terrasse dominant les toits.

Une heure, ça passe vite ! Et c'est plutôt rapidement que nous descendons la rampe pour rejoindre la gare.
J'accélère le rythme pour qu'il y ait au moins un prof présent au rendez-vous sur le quai et dans le train prévu.
Impossible de compter la meute ici, je grimpe avec la masse aux échos de "Oui oui, tout le monde est là, Madame ! Et tout le monde sait qu'il doit descendre à la gare suivante..."

Vérification faite sur la placette surplombant la sortie de la gare suivant : ils sont effectivement tous là... sauf mes trois collègues.
Ils n'ont plus besoin de profs... que pour se rassurer.

Le train suivant arrive une dizaine de minutes plus tard avec mes trois collègues qui nous rejoignent à Manarola.
Ce joli village coloré est regroupé le long de la route centrale qui recouvre le torrent.
Comme eux, torrent et route, notre belle bande de jeunes descend vers la mer avant de remonter à flanc de falaise vers un petit parc ombragé qui va accueillir notre déjeuner fait de pizza, focaccia et farinata déclinées en version nature, pesto et autres délicieuses variations ligures. Le tout commandé précédemment par ma collègue à un petit resto du village et récupéré au passage. Vive l'huile d'olive ! C'est bon, c'est agréable à déguster à l'ombre, face à la mer et en surplomb du village, même si diététiquement il y aurait à discuter...
Distribuer près de 240 portions prend du temps... et pendant que les profs déjeunent enfin, les jeunes s'éparpillent dans le village pour continuer leur "travail" de découverte et réflexion... ou pas : option foot pour certains, pause lézards pour d'autres...


 
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C'est magique ! Ils sont tous (et les collègues aussi) à l'heure au rendez-vous sur la placette... pour grimper à nouveau dans un train qui nous dépose à la gare suivante après quelques minutes de rail sous tunnels et à flanc de falaise face au panorama maritime captivant.
Corniglia, devinez... une heure d'"arrêt" !

Sauf que la gare de Corniglia est tout en bas, à peine quelques dizaines mètres au-dessus de la mer, alors que le village est accroché, là-haut, sur le piton rocheux.
Une petit grimpée digestive, ce n'est pas une mauvaise idée !
Les écarts se creusent vite entre les jeunes sportifs pressés et les pots-de-colle (vous savez, cette catégorie de jeunes qui a toujours besoin de rester au contact des adultes pour se faire materner) et les quadras fatigués qui, accessoirement, se trimbalent en relais un colis encombrant de restes de pizzas, foccacias et autres.

Le gruppetto à peine arrivé sur la placette qui domine côté sud que le ciel a décidé d'éternuer un bon coup. Ce sera la seule averse du jour, elle n'est ni conséquente ni longue, mais pas très agréable à se prendre sur le museau sans abri et rend surtout les ruelles pavées en pente très glissantes.

Même pas le temps de faire le tour des points de vue, encore moins de visite, qu'il faut déjà, presque en courant, redescendre rampes et escaliers jusqu'à la gare.

Encore un tour de magie ?! Ils sont tous là, à l'heure au rendez-vous, pour grimper dans la rame qui arrive à quai en même temps que les derniers.
C'est à mon tour de rater, volontairement, le train pour régler un petit détail personnel qui ne saurait attendre plus longtemps. 10 minutes avant le passage suivant, juste le temps qui m'est nécessaire...