De A à Z, l'Alphabet des voyageurZ

Fabizan, t'as été un peu rapide en passant au N de Norilsk... où je n'ai pas non plus envie d'aller, du reste.

Je réponds donc à Lilie avant que nous puissions basculer sur l'O, pas l'eau de Lahaut puisque là, ho que c'est dommage, il n'est pas...

Lilie a écrit:M comme... Mauritanie. Wapiti, tu nous en parles?

La Mauritanie, 16 ans après (déjà tant que cela ?!) ce qui fut mon premier voyage-trekk, il m'en reste des souvenirs profondément gravés dans mon âme.

La Mauritanie, ce fut d'abord la découverte d'un mini-aéroport au milieu de l'Adrar désertique, donc autant dire au milieu de nulle part, écrasé de chaleur, où l'on récupère ses bagages à même le tarmac et 'à la bonne franquette'...
Depuis, à chaque fois que j'atterris sur ce genre d'infrastructure rudimentaire, c'est toujours l'aéroport d'Atar qui revient sur mon écran intérieur, je n'y peux rien, c'est comme ça.

La Mauritanie, c'est cette impression irréelle, totalement magique, lorsque nous déambulions au milieu de Chinguetti...
Je suis à Chinguetti ! Non, ce n'est pas possible ? Je dois être en train de rêver, non ? Non, tu foules en ce moment le sable de Chinguetti, pour de vrai ! Tu respires l'air chaud et sablonneux de Chinguetti, pour de vrai ! Ces vieilles pierres que tu longes, que tu touches, assaillies de sables jaune-orangés, ces Mauritaniens enturbannés de bleu et blanc que tu croises et salues d'un salamalekoum ou oualekoumsalam, ces vieux manuscrits qu'un vieil homme édenté te présente dans la fraicheur sombre de sa bibliothèque, comme dans les reportages télévisuels... c'est bien ici, là, maintenant, réel ! Haaa, Chinguetti...

La Mauritanie, ce sont ces heures à brasser et s'enfoncer plus ou moins dans du sable ocre, jaune, orangé, brun... du sable sous nos pieds, du sable à perte de vue, qui s'étale en dunes, douces ondulations ou vraies montagnes qu'il nous faut escalader, que nous prenons plaisir à surfer sur leurs crêtes, ou peut-être encore plus à dégringoler en courant ou rouler-bouler... Du sable, le sable du Sahara, all day long...

Ce sont ces longues pauses au plus chaudes heures du jour, entassés sous la frêle ombre d'un arbuste-acacia allongée d'un carré de toile claire, dans une torpeur sans nom, par 45° à l'ombre... sans ombre.

La Mauritanie, ce sont ces oasis qui apparaissent soudainement au creux d'un cocon de dunes, dans un repli rocheux qui tient plus de la faille terrestre, éclats de verts poussiéreux au milieu de cet océan d'orangés, promesses d'un peu d'ombre, d'un peu de fraicheur, d'un peu d'humidité relative, d'une pause bien méritée au milieu de ces heures de marche...

La Mauritanie, ce sont ces soirées fraiches autour du feu, allumé ou fictif (le bois, denrée si précieuse !), arrosées de litres de délicieux thés à la menthe, au rythme des chants et danses des chameliers et cuisiniers, à écouter encore Mohammed nous raconter son pays, ses légendes, ses coutumes...

Ce sont ces nuits à la belle étoile, à découvrir, plonger, me noyer dans ce ciel-univers d'une netteté et d'une présence si intense qu'il semble m'aspirer vers la Voie Lactée, les Ours si (mé)connues, la Croix du Sud nouvellement découverte... Comment fermer les yeux et dormir devant - dedans ! - un tel spectacle ?

La Mauritanie, c'est tout cela, et c'est bien plus encore...

Et je découvre avec stupéfaction que je n'ai pas encore rapatrié mon carnet de ce voyage dans les ruelles villageoises ?! Voilà, c'est ajouté à la liste des choses à faire... un jour peut-être prochain...

R comme... Rotoroa Lake, dans le Nelson Lakes National Park, sur l'ile du Sud de Nouvelle-Zélande.
Le seul que j'ai vu en réalité. Le plus grand aussi. On tombe nez à nez avec lui dès qu'on sort de la cabane des rangers à l'entrée du parc. C'est lui qui nous accueille, paisible, tranquille. Tout en longueur, Il se faufile entre les montagnes, droit devant nous. Je l'ai vite quitté après une petite demi-heure de marche sur ses berges avant de continuer ma route pour quelques jours entre montagnes, forêt et torrents, loin de tout.

S comme... Salamina, Colombie.
C'est marrant ce nom qui me revient, d'un coup.
Petit village des montagnes, très coloré, type colonial. Il faut serpenter pendant quelques heures dans la végétation dense en écoutant de la musique locale à donf et le moteur qui ronfle depuis Manizales pour y accéder. C'est mon hôte colombien qui me l'avait tuyauté. Y ai je passé la nuit ? En tout cas, c'est là que j'ai acheté mon pancho fétiche, au marché hebdomadaire local, et que je porte encore très souvent à la maison, pas plus tard que ce soir.

Dans la cour du harem, lorsqu'on pénètre enfin dans ces lieux déserts et silencieux, des ombres impalpables flottent dans le sombre corridor où une faible lueur perce à travers une étroite lucarne. Les battants de la porte se sont refermés. Prison dorée pour l'éternité : dans ce harem d'autrefois, les captives qu'on amenait ici savaient qu'elles n'en ressortiraient qu'après leur mort.