Je fréquente une guest house qui s'apparente à une auberge espagnole où se côtoient diverses nationalités. Bon, je ne vais pas les énumérer, mais j'ai même vu un Coréen qui joue de la flûte ! Et l'entendre raconter sa vie erratique, cela vous guérit vite fait du débat touriste/voyageur ! Vous avez compris, ce n'est pas un touriste... comme nous tous ! Mais je veux surtout signaler mon voisin, un Belge, un Belge d'origine arménienne ! Lui, il voyage à bicyclette dans des lieux bien fatigants comme le Ladakh, par exemple, et il fait des photos remarquables grâce à un équipement excellent. Il passe ses journées à agencer, travailler, recadrer ses photos sur son ordinateur portable - un Apple, cela va de soit ! Et voila-t-il pas que l'autre matin, lui ayant dit que je vais voir l'employée qui s'occupe des chambres pour lui demander de me changer les draps et les serviettes de toilettes, il me dit de lui indiquer aussi sa chambre - ce que je fis. Avant de partir, je lui suggère, vu qu'il s'apprêtait à enfourcher son vélo, de lui laisser la clé de sa chambre, et c'est là que mon Belge d'origine arménienne m'a stupéfait :
- Non, non, pas la peine, je change moi-même les draps !
- Heu... ah bon ?
- Ben oui, je suis capable de faire mon lit tout seul, je ne suis pas du genre à me faire servir, moi !
- ??????????
- Et puis, dans un hôtel, j'aime pas qu'on porte mon bagage, je suis capable de le soulever tout seul !
- ????? Mais, finis-je par lui dire, tu vas créer du chômage, tu veux lui enlever son boulot ?
Je suis sûr qu'il n'avait pas pensé à çà ! Il est resté un peu bouche bée avant que de botter en touche. Du coup, cela m'a rappelé l'année où j'ai vadrouillé au Mexique (ainsi que Belize et Guatemala), il y a bien longtemps. Je raisonnais comme lui lorsque je croisais les petits cireurs de chaussures, les "Poulbots" mexicains ! Quoi, moi, me faire cirer les chaussures, jamais ! La honte ! Bien plus tard, je me suis dit que mon raisonnement était complètement stupide. Cela m'aurait coûté quelques pesos d'accepter, rien, quoi, et puis cela aurait permis à un môme de gagner un petit peu sa vie. Surtout que l'on ne me dise pas qu'il fallait donner une pièce, non, ces enfants ne demandaient pas la charité, l'aumône, ils voulaient juste exister par eux-mêmes.
En Thaïlande, chacun est dans son rôle social. Ainsi, on m'a raconté cette histoire d'un farang ( étranger à peau blanche) qui mangeait avec ses amis, dans la grande villa qu'il loue, et, voyant son employée qui venait d'arriver, l'invita à partager le repas avec tout le monde. Malaise de l'employée thaïe, elle est là pour travailler, elle n'est pas là pour s’assoir et manger avec son patron. Au fond, ce farang a commis la même erreur que le Belge d'origine arménienne : il voyage avec ses valeurs, sa perception du monde strictement occidentales ; je me demande aussi, si, on voulant se "faire bien voir" par l'autochtone, ils se sentent pas coupables d'avoir les moyens de vivre leur vie comme ils l'entendent !
Maadadayo !