12 Janvier 2010
Manizales
- Diego, Kurt, et Felipe –
Ce matin, comme prevu, je me suis donc rendue a la petite usine de cafe de Filandia, ou Diego m’avait donne rendez-vous quelques jours auparavant. Diego... Ah!... Diego! Plus je l’ecoutais parler, et plus je tombais amoureuse! Passione de sa terre donc, il m’expliqua tout le processus de torréfaction, degustation a la cle bien sur, et pour la premiere fois de ma vie, je mis le nez dans un sac de grains de cafe.
Je ne sais pas quand est-ce que j’ai commence a tomber sous le charme: etait-ce lorsque de tout son calme, tout en douceur et avec sa nonchalance, il me racontait le meilleur cafe de la region, le sien? Ou bien fut-ce lorsque, les yeux petillants, il commenca a me poser plein de questions sur mon pays, mes coutumes, ma terre natale? En y repensant, je crois qu’il essayait de me seduire (il est marie pourtant). A sa maniere, bien differente du classique “t’as de jolis yeux” que j’ai entendu en boucle ici en Colombie. Il me demanda quand etait la fete de mon pueblo. Alors il m’a dit qu’un jour, je le verrai debarquer dans mon blede un 14 Juillet, qu’il viendra me chercher! Ah! Ah!
Diego, il vend son cafe sans meme essayer de le faire. Moi, je lui aurai achete les 240 tonnes qu’il produit annuellement si j’avais eu les moyens, parce que naive que je suis, je gobais tout ce qu’il me disait.
Apres une heure et demi en sa compagnie, mes quatre paquets de cafe dans un sac, je l’ai quitte, completement fleur bleue.
C’est quelques instants plus tard que je suis tombee nez a nez avec Kurt, pres de l’eglise, sur la place principale. Kurt, je l’ai rencontre hier soir... au petit resto de Gonzalo! Kurt, originaire de Louisianne, vit maintenant dans l’etat de New York. Il etait avec son fils, Max. Les seuls gringos que j’ai croises ici a Filandia, et il a fallu qu’ils atterissent dans “mon” resto, a l’ecart des autres lieux de nourrisement! Si je n’ai pas accroche avec son fils, lui m’a paru des les premiers instants un homme adorable, ses yeux gris-bleus debordants de gentillesse et de bonte. Ils venaient d’acheter la veille une petite maison, dans un petit blede au Sud d’Armenia, dans le meme departement que Filandia. Histoire de coeur.
Ce matin, c’est Kurt tout seul que j’ai rencontre. Son fils etait parti accueillir des amis au petit aeroport d’Armenia, qui accueille pourtant un vol hebdomadaire depuis New York. On echange quelques mots, il me dit qu’il veut se rendre a Quimbaya, a quelques kilometres de la ou nous sommes. Il cherche l’endroit d’ou part le bus, moi aussi, mais pour Manizales lui dis-je. On s’accompagne dans notre petite recherche et bien sur que les bus pour Quimbaya ou autres destinations partent du meme bord de rue, pres du parque. Je l’y laisse, le temps d’aller chercher mes mochilas [sacs] laissees a mon hospedaje. Quand je reviens, Kurt me demande si ca ne me derange pas si finalement il m’accompagne a Manizales, qu’il a regarde dans son guide et que ca a l’air interessant.
- Aucun souci! Lui repond-je en riant, au contraire!
On a discute tout le long du trajet jusqu’au terminal de bus de Pereira, d’ou nous avons pris un autre bus en direction de Manizales et dans lequel nous avons continue a discuter deux heures durant, en s’emerveillant des jolis paysages, de ces montagnes, de cette nature luxuriante.
J’avais un plan Couch Surfing pour ce soir, mais mon contact n’arrivait pas en ville avant la soiree. J’ai donc accompagne Kurt pour sa recherche de logement: le premier hotel rencontre sur la place du centre... facile! J’ai laisse mon gros sac dans sa chambre, et suis partie au bureau d’immigration de la ville... Oui, ca faisait deux semaines que je stressais a cause de ma nouvelle date de sortie du territoire colombien, qui depassait d’un jour la duree que j’avais inscrite sur le papier officiel a mon arrivee en Colombie (par prudence et non en prevision d’extension de voyage!). Finalement, aucun souci, pas besoin de payer une extension de visa pour un jour m’ont-ils dit au bureau.
De retour en ville plus vite que prevu, me suis balladee, mange un Nieme corriente, et je suis retournee chercher Kurt a son hotel, comme nous avions convenu. La suite... quatre heures de discussions interessantes, d’autres plus legeres, quatre bieres, et quelques rires.
Kurt, fin de cinquantaine est medecin. Un petit medecin de campagne, qui a choisi avec sa femme de sortir du systeme de productivite qui regit la sante etatsunissienne (entre autre, de grandes corporations qui imposent aux medecins une visite toutes les dix a quinze minutes!). Ils gagnent beaucoup moins d’argent, mais pour rien au monde il ne changerait son mode de vie affirme-t-il. Je l’ecoutais parler de sa ferme a deux heures de New York City, ou il vit avec sa femme et ses trois fils, des ours qui viennent le saluer dans son jardin, des ouragans qui devastent sa Louisiane natale chaque annee. Il aime aussi beaucoup le Mexique, ou il vecut, ou il retourne encore de temps en temps. Et la Colombie, sa troisieme fois ici, pas pour autant qu’il en a fait le tour, bien loin de la!
A 20h, j’ai recupere mon sac a son hotel, et je l’ai laisse. Si j’avais eu trente ans de plus, je crois bien que je serais tombee sous le charme de cet autre homme, qui semble completement depourvu de tout mal, ou a l’inverse, plein d’amour. Un bel homme, au sens le plus profond.
Ensuite, un connard de taxi m’a deposee devant l’adresse que j’avais griffonee sur un bout de papier une heure plus tot via bigophone interpose. J’etais devant la maison de Felipe, 34 ans, mon hote ici a Manizales. On a parle peut-etre trente minutes seulement, mais suffisant pour accrocher avec ce fervant de Colombie, un pays qu’il semble voyager et partager des que l’occasion se presente. Premier contact super facile, comme si on se connaissait d’avance, sans se forcer. Demain, il m’embarque avec lui pour sa journee de travail!
Son taf, c’est de voyager dans tout le pays a la recherche de fruits et de lait destines a faire les produits laitiers d’une marque assez connue ici... Bacano [expression colombienne pour exprimer l’idee de “chouette, super”]! Alors il m’a demande si j’aimais marcher... tu parles! Je ne sais pas trop a quoi m’attendre, mais de voir du pays avec lui, ca me fout la frite, deja! Debout a 6h par contre, ca c’est moins drole.
Felipe semble lui aussi avoir un certain charisme... Vais-je aussi tomber sous le charme? Jamais deux sans trois dit-on!... Ah! Ah!
(...)
Lilie