Parce si je dis "je suis allée voir Karuna", ça n'évoque rien pour personne.
Et Karuna est important pour moi. Il est même important pour l'Inde...
C'est un dalit. Et au titre de l'accession aux études pour tous il est allé à l'université.
Il a obtenu son diplôme de pharmacien.
Il pouvait choisir un job bien rémunéré et avoir son officine.
Il a préféré travailler dans le bidonville, au dispensaire.
C'est là où nous nous sommes connus il y a plus de 15 ans déjà.
Et puis, aussi, Karuna a bousculé les traditions. Aujourd'hui il est marié et sa femme de la caste des vaishya, autant dire le haut du panier, est en rupture familiale totale. Ils s'aimaient, et, même au péril de leur vie sont allés au bout de leur choix.
Ils ont deux garçons, adolescents aujourd'hui, collégiens dans le vent, ils vivent dans une maisonnette en dure, ces petits blocs de béton coloré qu'on voit un peu partout.
A chaque séjour, je leur rends visite. On boit le chaï, les enfants me montrent leur cahier et aujourd'hui leur téléphone. Ce sont eux qui font des photos.
Hélène mourait d'envie de voir où j'avais bossé.
Elle n'est pas venue parce qu'elle craignait de traverser le bidonville. A Pondy, personne ne va là-bas et bien peu ont marché dans ce dédale de huttes et de constructions précaires .
Je crois que j'étais ravie d'y aller seule.
Il y a 15 ans :
