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9 participants
Carnets de Macédoine (2017)
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°76
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Lilie
fabizan- Localisation : Sainte Enimie Lozère
- Message n°77
Re: Carnets de Macédoine (2017)
C'est très beau Lilie !
_________________
Fabienne
Skyrgamur- Localisation : Normandie
- Message n°78
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Cette eau claire donne envie de s'y plonger
_________________
Skyrgamur, le lutin Islandais
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°79
Re: Carnets de Macédoine (2017)
- Maman, pourquoi il y a deux villes qui s’appellent Ohrid et qu’elles sont à côté ?
- Il n’y a pas deux villes, Kinderette. C’est la même !
- Bah ? Non ! Tu dis qu’ici c’est la vieille ville, et que là-bas, c’est la nouvelle ville... Ca veut dire qu’il y a deux villes !
Sur les hauteurs, aux portes des fortifications qui entourent la vieille ville, côté château fort, on surplombe la ville nouvelle d’Ohrid, qui s’étend à plat, depuis le vieux port qui joint la ville historique et la partie contemporaine d’Ohrid, une ville provinciale d’Ex-Yougoslavie, sans flonflon.
Aux siècles anciens, on a certainement construit sur cette colline la place forte, un château ensuite, avec vue imprenable sur les environs, puis le mur d’enceinte protégeant les habitations des ennemis alentours.
Château fort, mais aussi amphithéâtre romain incroyablement bien conservé, des églises à n’en plus savoir où tourner la tête, des monastères... Et Ohrid est loin d’avoir livré tous ses secrets, la ville paraissant être à elle toute seule un gigantesque terrain de fouilles archéologiques ! Dans cette vieille ville escarpée où les distances se comptent en dénivelés et non en mètres, partout, les chantiers de fouilles à ciel ouverts, les truelles qui raclent, les burins sur la pierre font partie de la vie citadine en 2017.
Dans la ruelle qui grimpait jusqu’à notre logement, des colonnes et les fondations d’un édifice religieux que je devinais avait attisé ma curiosité. Surtout l’homme agenouillé qui grattait au sol avec minutie de petits carreaux de mosaïque. Nous étions descendues l’aborder. Il avait déjà mis à jour quelques magnifiques mosaïques, celle d’un paon notamment, qu’il avait nettoyé peu de temps avant, et qui révélait alors toute la splendeur de couleurs encore chatoyantes. Il était restaurateur de monuments anciens, celui-ci, une basilique datant du Ve siècle, et ne manquait pas de travail ici à Ohrid. Ce jour-là, je pris conscience de l’ampleur de la tâche pour mettre à jour tout ce qui avait déjà été mis à jour, ou restauré, mais surtout de tout ce qu’il restait sans doute à mettre à jour à Ohrid ! Le monastère Saint-Paneleimon a lui-même été construit sur le site d’une ancienne basilique, dont les fondations ont elles aussi été mises au jour et où des fouilles se poursuivaient toujours lors de notre passage. Peut-être Ohrid est connue des archéologues du monde entier, mais moi, je n’en avais jamais entendue parler avant de venir en Macédoine !
Il est facile d’aimer se perdre dans le vieux Ohrid, tant des escaliers biscornus à la destination inconnue vous happent le regard, tant les ruelles étroites qui grimpent ou qui descendent sur les pavés vous entraînent jusqu’à la prochaine chapelle, en prenant soin de vous faire passer au pied de bâtisses aux balcons fleuris et aux poutres fières. Quand on descend la vieille ville, ce labyrinthe des siècles vous mène inéluctablement sur les rives du Géant Bleu, caché, et qui dévoile à l’oeil toute sa placide grandeur d’un coup, d’un seul.
Le trait d’union entre la vieille et la nouvelle ville, c’est l’esplanade, sur le vieux port. Une transition qui se fait en douceur pour le badaud et l’habitant où les deux se mélangent parfaitement. Dans les rues de l’ancienne et de la nouvelle ville fréquentées par les touristes, les échoppes de fortune sont communes. On y trouve magnets aux couleurs du pays et autres dés à coudre fabriqués en Chine ou en Turquie. Les touristeux, que ce soit les vendeuses des échoppes, ou les « capitaines » d’embarcations sur le lac sont tout sauf entreprenants, et pas de voleur à la sauvette non plus dans cette ville à l’atmosphère détendue. Qu’elle doit être chouette cette ville à l’automne lorsqu’elle est vidée de sa foule estivale ! Je l’y imagine tel un abricot, douce et orange sucré.
La nouvelle ville est une ville tout ce qu’il y a de plus ville, des bâtiments pas trop hauts, des maisons individuelles et leurs jardins arborés beaucoup, des bouches d’égout que les éboueurs éventrent pour nettoyer la rue, des semblants de trottoirs et des panneaux inexistants dès que l’on s’éloigne des artères principales, des peaux foncées, des traits grossiers, des nez crochus, des croix orthodoxes, des voiles sur les visages.
Je l’ai appris ici, Alexandre le Grand, considéré comme le seul à avoir réussi à unifier l’Occident et l’Orient, était roi de Macédoine. Je l’avais toujours cru Grec. Les Grecs le revendiquent d’ailleurs toujours des leurs, raison suffisante apparemment pour mettre leur véto sur l’entrée de la Macédoine dans l’Union Européenne et dans l’Otan. Alexandre Le Grand, Macédonien, unificateur des mondes, ironie quand on connaît la suite de l’histoire en Macédoine, pays mosaïque aux siècles d’invasions et de conflits. Il paraitrait d’ailleurs que c’est la raison pour laquelle on aurait nommé la salade mosaïque de légumes du nom de ce pays, « Macédoine ». Parce qu’en vrai dans ce pays, quand vous commandez une salade macédonienne, ça n’a rien à voir avec la macédoine que je vomissais quand j’étais petite ! La salade macédonienne varie selon les tables, mais on y trouve forcément du paprika ou autre sorte de poivrons, et du fromage de brebis genre feta.
Le matin de notre départ, nous avons quitté la vieille ville d’Ohrid à pied, pour rejoindre le terminal de bus deux kilomètres plus loin, dans la ville nouvelle. Il ne m’avait pas paru si loin à notre arrivée. Le nez en l’air et à la recherche de l’itinéraire, demandant notre chemin à trois reprises, je n’ai pas pensé que nous ne reverrions pas le lac, même depuis les fenêtres de l’autocar dont le trajet que j’ignorais alors s’éloignerait de la ville et du lac vers le sud est, à travers les montagnes. Nous l’avons quitté sans même lui dire au revoir, sans même lui dire merci. C’était la fin d’une idylle.
(...)
Lilie
- Il n’y a pas deux villes, Kinderette. C’est la même !
- Bah ? Non ! Tu dis qu’ici c’est la vieille ville, et que là-bas, c’est la nouvelle ville... Ca veut dire qu’il y a deux villes !
Sur les hauteurs, aux portes des fortifications qui entourent la vieille ville, côté château fort, on surplombe la ville nouvelle d’Ohrid, qui s’étend à plat, depuis le vieux port qui joint la ville historique et la partie contemporaine d’Ohrid, une ville provinciale d’Ex-Yougoslavie, sans flonflon.
Aux siècles anciens, on a certainement construit sur cette colline la place forte, un château ensuite, avec vue imprenable sur les environs, puis le mur d’enceinte protégeant les habitations des ennemis alentours.
Château fort, mais aussi amphithéâtre romain incroyablement bien conservé, des églises à n’en plus savoir où tourner la tête, des monastères... Et Ohrid est loin d’avoir livré tous ses secrets, la ville paraissant être à elle toute seule un gigantesque terrain de fouilles archéologiques ! Dans cette vieille ville escarpée où les distances se comptent en dénivelés et non en mètres, partout, les chantiers de fouilles à ciel ouverts, les truelles qui raclent, les burins sur la pierre font partie de la vie citadine en 2017.
Dans la ruelle qui grimpait jusqu’à notre logement, des colonnes et les fondations d’un édifice religieux que je devinais avait attisé ma curiosité. Surtout l’homme agenouillé qui grattait au sol avec minutie de petits carreaux de mosaïque. Nous étions descendues l’aborder. Il avait déjà mis à jour quelques magnifiques mosaïques, celle d’un paon notamment, qu’il avait nettoyé peu de temps avant, et qui révélait alors toute la splendeur de couleurs encore chatoyantes. Il était restaurateur de monuments anciens, celui-ci, une basilique datant du Ve siècle, et ne manquait pas de travail ici à Ohrid. Ce jour-là, je pris conscience de l’ampleur de la tâche pour mettre à jour tout ce qui avait déjà été mis à jour, ou restauré, mais surtout de tout ce qu’il restait sans doute à mettre à jour à Ohrid ! Le monastère Saint-Paneleimon a lui-même été construit sur le site d’une ancienne basilique, dont les fondations ont elles aussi été mises au jour et où des fouilles se poursuivaient toujours lors de notre passage. Peut-être Ohrid est connue des archéologues du monde entier, mais moi, je n’en avais jamais entendue parler avant de venir en Macédoine !
Il est facile d’aimer se perdre dans le vieux Ohrid, tant des escaliers biscornus à la destination inconnue vous happent le regard, tant les ruelles étroites qui grimpent ou qui descendent sur les pavés vous entraînent jusqu’à la prochaine chapelle, en prenant soin de vous faire passer au pied de bâtisses aux balcons fleuris et aux poutres fières. Quand on descend la vieille ville, ce labyrinthe des siècles vous mène inéluctablement sur les rives du Géant Bleu, caché, et qui dévoile à l’oeil toute sa placide grandeur d’un coup, d’un seul.
Le trait d’union entre la vieille et la nouvelle ville, c’est l’esplanade, sur le vieux port. Une transition qui se fait en douceur pour le badaud et l’habitant où les deux se mélangent parfaitement. Dans les rues de l’ancienne et de la nouvelle ville fréquentées par les touristes, les échoppes de fortune sont communes. On y trouve magnets aux couleurs du pays et autres dés à coudre fabriqués en Chine ou en Turquie. Les touristeux, que ce soit les vendeuses des échoppes, ou les « capitaines » d’embarcations sur le lac sont tout sauf entreprenants, et pas de voleur à la sauvette non plus dans cette ville à l’atmosphère détendue. Qu’elle doit être chouette cette ville à l’automne lorsqu’elle est vidée de sa foule estivale ! Je l’y imagine tel un abricot, douce et orange sucré.
La nouvelle ville est une ville tout ce qu’il y a de plus ville, des bâtiments pas trop hauts, des maisons individuelles et leurs jardins arborés beaucoup, des bouches d’égout que les éboueurs éventrent pour nettoyer la rue, des semblants de trottoirs et des panneaux inexistants dès que l’on s’éloigne des artères principales, des peaux foncées, des traits grossiers, des nez crochus, des croix orthodoxes, des voiles sur les visages.
Je l’ai appris ici, Alexandre le Grand, considéré comme le seul à avoir réussi à unifier l’Occident et l’Orient, était roi de Macédoine. Je l’avais toujours cru Grec. Les Grecs le revendiquent d’ailleurs toujours des leurs, raison suffisante apparemment pour mettre leur véto sur l’entrée de la Macédoine dans l’Union Européenne et dans l’Otan. Alexandre Le Grand, Macédonien, unificateur des mondes, ironie quand on connaît la suite de l’histoire en Macédoine, pays mosaïque aux siècles d’invasions et de conflits. Il paraitrait d’ailleurs que c’est la raison pour laquelle on aurait nommé la salade mosaïque de légumes du nom de ce pays, « Macédoine ». Parce qu’en vrai dans ce pays, quand vous commandez une salade macédonienne, ça n’a rien à voir avec la macédoine que je vomissais quand j’étais petite ! La salade macédonienne varie selon les tables, mais on y trouve forcément du paprika ou autre sorte de poivrons, et du fromage de brebis genre feta.
Le matin de notre départ, nous avons quitté la vieille ville d’Ohrid à pied, pour rejoindre le terminal de bus deux kilomètres plus loin, dans la ville nouvelle. Il ne m’avait pas paru si loin à notre arrivée. Le nez en l’air et à la recherche de l’itinéraire, demandant notre chemin à trois reprises, je n’ai pas pensé que nous ne reverrions pas le lac, même depuis les fenêtres de l’autocar dont le trajet que j’ignorais alors s’éloignerait de la ville et du lac vers le sud est, à travers les montagnes. Nous l’avons quitté sans même lui dire au revoir, sans même lui dire merci. C’était la fin d’une idylle.
(...)
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°80
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Lilie
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°81
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Elle est magnifique cette belle inconnue....
Fabricia- Localisation : Alpes Maritimes
- Message n°82
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Des mots et des images pour une belle découverte : bravo et merci à vous, Lilies !
_________________
Fabricia
"Le présent est un leurre puisqu'il se transforme sans cesse en passé" (selon Flora Groult)
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°83
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Cadeaux bonus
Lilie
Lilie
Fabricia- Localisation : Alpes Maritimes
- Message n°84
Re: Carnets de Macédoine (2017)
!
_________________
Fabricia
"Le présent est un leurre puisqu'il se transforme sans cesse en passé" (selon Flora Groult)
Skyrgamur- Localisation : Normandie
- Message n°85
Re: Carnets de Macédoine (2017)
_________________
Skyrgamur, le lutin Islandais
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°86
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Jeudi 20 juillet 2017,
Bitola
- Sedum, ça veut dire « sept » en Macédonien.
- Pèt, c’est rigolo ! c’est « cinq » !
- Dèset, ça veut dire « dix ».
- Tri, ça veut dire « trois ».
C’était Meri qui m’a appris à compter en Macédonien.
Aujourd’hui, on a pris le bus, ce matin, pour aller jusqu’à... Bitola ! Et ensuite on est allée encore dans une guesthouse. Et pis dans le jardin, c’était comme un petit parc. Il était bien, il était plus bien que celui de la maison de Magda et de Eleonora parce que y avait un préau et y avait une piscine et y avait un hamac aussi. Et la dame elle s’appelait Betty. Maman, elle a un peu discuté, on est rentrée dans la chambre. Ensuite on est ressortie aller manger mais d’abord j’ai joué un petit peu au parc et c’était trop bien et même en revenant ! Ensuite on est re-rentrée ! J’ai fait la sieste. Ensuite on s’est promené un petit peu. Maman elle avait fait une bêtise dans le magasin parce que elle a fait tomber le yaourt et la dame elle était pas contente et pour lui montrer qu’elle était pas contente, elle jetait les choses au lieu de lui donner. Ensuite on a acheté une carte pour J.. Ensuite on a mangé, puis c’est ainsi que ça se finit !
(...)
Kinderette
Bitola
- Sedum, ça veut dire « sept » en Macédonien.
- Pèt, c’est rigolo ! c’est « cinq » !
- Dèset, ça veut dire « dix ».
- Tri, ça veut dire « trois ».
C’était Meri qui m’a appris à compter en Macédonien.
Aujourd’hui, on a pris le bus, ce matin, pour aller jusqu’à... Bitola ! Et ensuite on est allée encore dans une guesthouse. Et pis dans le jardin, c’était comme un petit parc. Il était bien, il était plus bien que celui de la maison de Magda et de Eleonora parce que y avait un préau et y avait une piscine et y avait un hamac aussi. Et la dame elle s’appelait Betty. Maman, elle a un peu discuté, on est rentrée dans la chambre. Ensuite on est ressortie aller manger mais d’abord j’ai joué un petit peu au parc et c’était trop bien et même en revenant ! Ensuite on est re-rentrée ! J’ai fait la sieste. Ensuite on s’est promené un petit peu. Maman elle avait fait une bêtise dans le magasin parce que elle a fait tomber le yaourt et la dame elle était pas contente et pour lui montrer qu’elle était pas contente, elle jetait les choses au lieu de lui donner. Ensuite on a acheté une carte pour J.. Ensuite on a mangé, puis c’est ainsi que ça se finit !
(...)
Kinderette
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°87
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Ah ben comme ça tu fais tomber le yaourt toi ?
Bravo !
Bravo !
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°88
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Oui! Je l'ai bien explosé même!
Lilie
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°89
Re: Carnets de Macédoine (2017)
20 juillet 2017,
Bitola
L’heure du déjeuner a été une nouvelle fois l’occasion pour Kinderette de me poser une avalanche de questions. Le resto local que j’avais choisi au coin de la rue, mettait en plus tout en sa faveur : le serveur débonnaire, occupé sans s’affairer, a pris tout son temps pour venir me voir, le menu en cyrillique a ajouté des préliminaires, et nos deux salades bien garnies ont conclu de prolongations la séquence questionnement de Kinderette.
- Maman, c’était quoi ton premier travail ?
- Garder des enfants.
- Quand t’étais adolescente ?
- Oui.
- Et ton deuxième ?
- Faire payer les gens dans un supermarché, quand j’étais adolescente un peu plus vieille.
- Et t’aimais bien ?
- A l’époque, oui, c’était rigolo. Ca me permettait de mettre de l’essence dans ma voiture et de payer mes sorties. Maintenant, je ne suis pas sure que j’aimerais...
- Et ton troisième travail ?
- C’était en Irlande, à Dublin. Je répondais au téléphone pour les gens qui avaient leur imprimante cassée, et je leur envoyais quelqu’un pour les réparer.
En écrivant ça, me revient mon vrai premier job en Irlande : c’était serveuse dans un resto Indien, à Thurles. Un de plus qui vient s’ajouter à ma looooongue liste de travails !
- Et ton quatrième travail ?
- Dans une banque, en Irlande.
- Et ton cinquième travail ?
- Dans une banque, en Australie.
- Et ton sixième travail ?
- ...
- Et ton septième travail ?
- ...
- Hein ?! Ton septième travail ?! Pour de vrai ?!
Prise de conscience kinderettesque. Ses sourcils se sont mis en circonflexe à mon septième travail... Elle ne pensait sans doute pas qu’on pouvait avoir autant de travails dans sa vie. Sauf que la liste à continuer à s’allonger, et les sourcils sont restés bloqués jusqu’à mon travail actuel... le treizième.
- Hein ?! Mais t’as dû gagner beaucoup d’argent si t’as fait tous ces travails !
- Non, pas vraiment. C’était pas des travails où on gagnait toujours beaucoup d’argent... mais ça me suffisait pour vivre.
- Parce que avoir beaucoup d’argent, c’est pas important !
- Pour moi, non, c’est pas important. Il en faut quand même un peu pour être heureux, mais ce n’est pas le plus important pour être heureux.
- C’est quoi le plus important pour être heureux ?
- L’Amour !... Et la liberté !... Et les rêves ! Beaucoup de rêves !
- Comment on fait pour gagner de l’amour ?
- En en donnant.
- Et comment on fait pour gagner de la liberté ?
- En le choisissant, quand on a la chance de pouvoir choisir.
- Et comment on fait pour gagner des rêves ? Ah ! Je sais ! En dormant beaucoup !
(...)
Lilie
Bitola
L’heure du déjeuner a été une nouvelle fois l’occasion pour Kinderette de me poser une avalanche de questions. Le resto local que j’avais choisi au coin de la rue, mettait en plus tout en sa faveur : le serveur débonnaire, occupé sans s’affairer, a pris tout son temps pour venir me voir, le menu en cyrillique a ajouté des préliminaires, et nos deux salades bien garnies ont conclu de prolongations la séquence questionnement de Kinderette.
- Maman, c’était quoi ton premier travail ?
- Garder des enfants.
- Quand t’étais adolescente ?
- Oui.
- Et ton deuxième ?
- Faire payer les gens dans un supermarché, quand j’étais adolescente un peu plus vieille.
- Et t’aimais bien ?
- A l’époque, oui, c’était rigolo. Ca me permettait de mettre de l’essence dans ma voiture et de payer mes sorties. Maintenant, je ne suis pas sure que j’aimerais...
- Et ton troisième travail ?
- C’était en Irlande, à Dublin. Je répondais au téléphone pour les gens qui avaient leur imprimante cassée, et je leur envoyais quelqu’un pour les réparer.
En écrivant ça, me revient mon vrai premier job en Irlande : c’était serveuse dans un resto Indien, à Thurles. Un de plus qui vient s’ajouter à ma looooongue liste de travails !
- Et ton quatrième travail ?
- Dans une banque, en Irlande.
- Et ton cinquième travail ?
- Dans une banque, en Australie.
- Et ton sixième travail ?
- ...
- Et ton septième travail ?
- ...
- Hein ?! Ton septième travail ?! Pour de vrai ?!
Prise de conscience kinderettesque. Ses sourcils se sont mis en circonflexe à mon septième travail... Elle ne pensait sans doute pas qu’on pouvait avoir autant de travails dans sa vie. Sauf que la liste à continuer à s’allonger, et les sourcils sont restés bloqués jusqu’à mon travail actuel... le treizième.
- Hein ?! Mais t’as dû gagner beaucoup d’argent si t’as fait tous ces travails !
- Non, pas vraiment. C’était pas des travails où on gagnait toujours beaucoup d’argent... mais ça me suffisait pour vivre.
- Parce que avoir beaucoup d’argent, c’est pas important !
- Pour moi, non, c’est pas important. Il en faut quand même un peu pour être heureux, mais ce n’est pas le plus important pour être heureux.
- C’est quoi le plus important pour être heureux ?
- L’Amour !... Et la liberté !... Et les rêves ! Beaucoup de rêves !
- Comment on fait pour gagner de l’amour ?
- En en donnant.
- Et comment on fait pour gagner de la liberté ?
- En le choisissant, quand on a la chance de pouvoir choisir.
- Et comment on fait pour gagner des rêves ? Ah ! Je sais ! En dormant beaucoup !
(...)
Lilie
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°90
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Et des discussions comme celle-là, elles n'ont pas de prix !!!
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°91
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Même jour, de nuit.
L’orage s’est tu. J’écris à la lueur de ma frontale qui n’a d’autre vocation comme présence dans mon sac. Kinderette est couchée mais tourne et retourne dans son lit depuis près d’une heure maintenant. Elle me dit qu’elle a chaud. Je ne ressens pas cette chaleur, mais elle est dans un recoin de notre grande chambre aux trois lits simples, sous la pente du toit : peut-être y fait-il plus chaud que dans le reste de la pièce.
Je viens de lancer la clim’, luxe auquel on ne s’attend pas quand on voit le bâtiment défraîchi en arrivant. Ce sont surtout les bâtiments qui l’entourent qui datent de Mathusalem, des journaux colmatant les vitres brisées. C’est une université, Betty me l’a fait comprendre en arrivant ce matin, et je l’ai constaté en passant devant les salles de classes que l’on aperçoit de l’extérieur.
- Mais elles sont vieilles, Maman !
- Oui. En France, on a de la chance, on a de belles écoles, de jolis jeux dans les cours, de beaux livres et de belles tables. Ici, il y a moins d’argent, alors les écoles, elles ont des choses plus vieilles.
Betty parle Anglais, un Anglais correcte, ce qui m’a surprise pour une femme de son âge, probablement proche de celui de ma mère. Autour d’un café turc, dans son cozy jardin fleuri et ombragé, au gazon synthétique où un hamac tient compagnie aux deux piscines gonflables et aux chatons errants, Betty m’a raconté, un peu. La région, sa situation familiale.
Fils, belle-fille, mari, petits enfants. Tour à tour les acteurs entre en scène sous la tonnelle où nous sommes assises.
- Tu fumes ? me fait-elle en me proposant le paquet de blondes sur la table.
- Non. Avant, mais plus maintenant. Ton fils, il habite ici ?
- Non. Ma fille vit à Skopje. Elle vient ici l’été. On a une autre maison à l’autre bout de la ville. Mon fils y habite. Ici, c’est calme. Des fois, c’est bien, mais mes amis me manquent, sortir, faire des choses. On est près du centre ici, mais c’est pas pareil.
- Oui, la vie urbaine.
- Oui. Tous les ans, on dit que c’est la dernière année ici, à l’hostel, mais tous les ans, on fait encore une année de plus. Mais... J’imagine qu’on aime bien quand même...
Elle ne creuse pas le sujet. Je comprend que si son mari et elle continuent à tenir cet établissement, c’est simplement pour pouvoir vivre. Les touristes se font rares ici, et même si Bitola est le deuxième centre économique du pays, c’est bien la capitale et Ohrid qui concentrent le gros du tourisme du pays, 80 à 90% à elles deux m’est d’avis.
La ville respire le manque d’argent et je sens ici le faible PIB que les chiffres officiels m’avaient renseignés lorsque j’avais rapidement glané quelques informations sur la Macédoine avant de venir y mettre les pieds.
Je n’ai eu qu’un bref aperçu de la ville aujourd’hui, entre le désertique terminal de bus où nous sommes descendues en arrivant, et la rue piétonne principale qui voudrait se donner des airs de bourgeoises mais dont la décrépitude est évidente, malgré les panneaux au logo « Liberté, Egalité, Fraternité » annonçant l’aide financière de la France pour remettre le centre ville au goût du jour il y a quelques années sans doute. Il faut dire que le Tricolore flotte fièrement dans... la rue principale. Le consulat de France en Macédoine y a élu domicile. Tout comme celui de Serbie, de Bulgarie, d’Allemagne et d’autres pays européens, héritage de je ne sais quelle page d’histoire du XXe siècle.
C’était peut-être le lourd ciel orageux, ou la descente de ma tour d’ivoire après avoir quitté Ohrid, la splendide, mais ce soir, après une heure de furtive balade dans le coeur de la ville, j’étais d’humeur maussade. Pourtant, ce midi, fondue dans la populace locale, populaire, j’ai aimé notre longue pause déjeuner. Une grande tablée familiale, multigénérationnelle quittait les lieux lorsque nous nous installions, laissant derrière eux les restes d’un banquet gracieux : des bouteilles de spiritueux vides, et un grand plateau de pastèques et de melons jaunes, fruits que j’ai vus débordants des camions en bord de routes, depuis ma fenêtre de bus en venant d’Ohrid, à une heure de route d’ici.
Bitola n’est qu’à une quinzaine de kilomètres de la Grèce. Quelques kilomètres avant l’entrée dans la ville, pointant la même direction que Bitola, un panneau a d’ailleurs attiré mon regard. Il lisait « Athens ». Betty m’a dit que même si la région de Macédoine s’étire entre la Grèce, l’Albanie, un peu de Bulgarie, et la République de Macédoine, cette région où nous sommes n’a jamais fait partie de la Grèce, qu’avant elle faisait partie du Royaume de Serbie. J’en suis surprise, mais Betty étant originaire de Bitola depuis des générations, je me fie complètement à ses paroles, d’autant plus qu’elle a l’air d’en connaître un rayon sur l’histoire de ce bout de Terre !
PS : il est 22h45, et Kinderette ne dort toujours pas !
Lilie
L’orage s’est tu. J’écris à la lueur de ma frontale qui n’a d’autre vocation comme présence dans mon sac. Kinderette est couchée mais tourne et retourne dans son lit depuis près d’une heure maintenant. Elle me dit qu’elle a chaud. Je ne ressens pas cette chaleur, mais elle est dans un recoin de notre grande chambre aux trois lits simples, sous la pente du toit : peut-être y fait-il plus chaud que dans le reste de la pièce.
Je viens de lancer la clim’, luxe auquel on ne s’attend pas quand on voit le bâtiment défraîchi en arrivant. Ce sont surtout les bâtiments qui l’entourent qui datent de Mathusalem, des journaux colmatant les vitres brisées. C’est une université, Betty me l’a fait comprendre en arrivant ce matin, et je l’ai constaté en passant devant les salles de classes que l’on aperçoit de l’extérieur.
- Mais elles sont vieilles, Maman !
- Oui. En France, on a de la chance, on a de belles écoles, de jolis jeux dans les cours, de beaux livres et de belles tables. Ici, il y a moins d’argent, alors les écoles, elles ont des choses plus vieilles.
Betty parle Anglais, un Anglais correcte, ce qui m’a surprise pour une femme de son âge, probablement proche de celui de ma mère. Autour d’un café turc, dans son cozy jardin fleuri et ombragé, au gazon synthétique où un hamac tient compagnie aux deux piscines gonflables et aux chatons errants, Betty m’a raconté, un peu. La région, sa situation familiale.
Fils, belle-fille, mari, petits enfants. Tour à tour les acteurs entre en scène sous la tonnelle où nous sommes assises.
- Tu fumes ? me fait-elle en me proposant le paquet de blondes sur la table.
- Non. Avant, mais plus maintenant. Ton fils, il habite ici ?
- Non. Ma fille vit à Skopje. Elle vient ici l’été. On a une autre maison à l’autre bout de la ville. Mon fils y habite. Ici, c’est calme. Des fois, c’est bien, mais mes amis me manquent, sortir, faire des choses. On est près du centre ici, mais c’est pas pareil.
- Oui, la vie urbaine.
- Oui. Tous les ans, on dit que c’est la dernière année ici, à l’hostel, mais tous les ans, on fait encore une année de plus. Mais... J’imagine qu’on aime bien quand même...
Elle ne creuse pas le sujet. Je comprend que si son mari et elle continuent à tenir cet établissement, c’est simplement pour pouvoir vivre. Les touristes se font rares ici, et même si Bitola est le deuxième centre économique du pays, c’est bien la capitale et Ohrid qui concentrent le gros du tourisme du pays, 80 à 90% à elles deux m’est d’avis.
La ville respire le manque d’argent et je sens ici le faible PIB que les chiffres officiels m’avaient renseignés lorsque j’avais rapidement glané quelques informations sur la Macédoine avant de venir y mettre les pieds.
Je n’ai eu qu’un bref aperçu de la ville aujourd’hui, entre le désertique terminal de bus où nous sommes descendues en arrivant, et la rue piétonne principale qui voudrait se donner des airs de bourgeoises mais dont la décrépitude est évidente, malgré les panneaux au logo « Liberté, Egalité, Fraternité » annonçant l’aide financière de la France pour remettre le centre ville au goût du jour il y a quelques années sans doute. Il faut dire que le Tricolore flotte fièrement dans... la rue principale. Le consulat de France en Macédoine y a élu domicile. Tout comme celui de Serbie, de Bulgarie, d’Allemagne et d’autres pays européens, héritage de je ne sais quelle page d’histoire du XXe siècle.
C’était peut-être le lourd ciel orageux, ou la descente de ma tour d’ivoire après avoir quitté Ohrid, la splendide, mais ce soir, après une heure de furtive balade dans le coeur de la ville, j’étais d’humeur maussade. Pourtant, ce midi, fondue dans la populace locale, populaire, j’ai aimé notre longue pause déjeuner. Une grande tablée familiale, multigénérationnelle quittait les lieux lorsque nous nous installions, laissant derrière eux les restes d’un banquet gracieux : des bouteilles de spiritueux vides, et un grand plateau de pastèques et de melons jaunes, fruits que j’ai vus débordants des camions en bord de routes, depuis ma fenêtre de bus en venant d’Ohrid, à une heure de route d’ici.
Bitola n’est qu’à une quinzaine de kilomètres de la Grèce. Quelques kilomètres avant l’entrée dans la ville, pointant la même direction que Bitola, un panneau a d’ailleurs attiré mon regard. Il lisait « Athens ». Betty m’a dit que même si la région de Macédoine s’étire entre la Grèce, l’Albanie, un peu de Bulgarie, et la République de Macédoine, cette région où nous sommes n’a jamais fait partie de la Grèce, qu’avant elle faisait partie du Royaume de Serbie. J’en suis surprise, mais Betty étant originaire de Bitola depuis des générations, je me fie complètement à ses paroles, d’autant plus qu’elle a l’air d’en connaître un rayon sur l’histoire de ce bout de Terre !
PS : il est 22h45, et Kinderette ne dort toujours pas !
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°92
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Je ne le savais pas, mais ces mots étaient les derniers que j’écrivais de mon carnet de voyage macédonien.
Le lendemain fût un Vendredi noir. Kinderette exprimait sans doute le contrecoup de deux semaines de voyage, et même si j’avais fait attention à ne pas la surmener, à respecter son sommeil, son âge, prendre en compte la chaleur, elle donnait ce jour des signes de fatigue évidente. Après une nuit agitée, nous étions restées tranquillement nous reposer le matin, dans la chambre, entre lessive et jeux pour Kinderette. Une crise de caprices au moment où nous sortions nous balader en ville pour la première fois le midi nous avait ramenées dans notre chambre, où Kinderette, vexée, n’avait pas voulu siester, ce qui n’arrangea pas les choses. Elle finit par s’endormir vers 16h, ce qui ne fît qu’ajouter à ma frustration d’une journée gâchée, d’autant plus qu’à ce même moment, Ben et Iwona, amis Anglos-polonais de mon époque dublinoise, en road trip dans les Balkans et qui avaient fait un détour par Bitola spécialement pour nous voir, venaient d’arriver en ville d’où il repartiraient le lendemain matin. Le temps de repos de Kinderette me permit de prendre du recul sur la situation. Certes, une journée enfermée dans une chambre sur deux semaines de voyage, c’est frustrant, mais cela fait aussi partie du voyage, les coups de fatigue, les baisses de moral, pour moi, comme pour ma fille.
A son réveil, nous faisions table rase de la journée, et conclûmes un pacte de bonne humeur, bien décidées à passer un bon moment en ville, en compagnie de Ben et Iwona que nous étions toutes deux ravies de retrouver depuis Lublin en Pologne, où nous les avions laissés un an plus tôt.
C’est en terrasse autour de verres de vins macédoniens que nous retrouvions nos deux épicuriens voyageurs qui arrivaient de Skopje, halte que je leur avais tuyautée et dont ils avaient évidemment adoré la démesure.
Nous nous dirigeâmes ensuite vers un bar original, à l’image du propriétaire des lieux qui a créé dans cet endroit un véritable musée où l’on peut déguster du vin macédonien sur le plus vieux piano de la ville, éclairé par un lustre en véritables chapeaux de broderie ancienne, tout en contemplant un énorme sablier de la hauteur de la salle en sous-sol, sablier qui ne fonctionne pas car « quand on entre ici, le temps s’arrête », dixit le charmant serveur qui se transforma le temps de dix minutes en guide privé pour les joyeux curieux que nous étions.
Nous avions commencé notre moment en ce lieu sur sa terrasse extérieure, près de la fontaine de la place où débouche la rue piétonne, unique artère pseudo-touristique de la ville où j’ai d’ailleurs eu bien du mal à trouver une carte postale. Sur cette terrasse blindée de monde, comme toutes les autres de la ville d’ailleurs, il faisait encore très chaud ce jour-là, et Ben, Iwona et moi fûmes tous trois surpris de voir s’installer sur une table voisine, un prêtre orthodoxe, avec sa pint de bière. Quadra brun et barbu d’allure biker et rocker, il venait rejoindre un couple trentenaire et ils avaient l’air de bien s’amuser. Je bavais sur lui, et Ben et Iwona en plaisantaient. Il faut dire que c’était physiquement tout à fait mon genre d’homme, l’aube de prêtre en moins. J’ai failli m’étouffer d’un délicieux tapas local que nous étions en train de déguster, quand un second prêtre, plus jeune, blond vénicien et imberbe est arrivé... et que je découvrais qu’il tenait par la main la jolie jeune fille qui était à ses côtés. Ben mince alors ! Les prêtres orthodoxes peuvent se marier ? Ca me les rendait tout de suite plus sympathique, surtout son copain barbu qui était assis à quelques mètres de mois, et lui, sans aucune compagnie féminine !... Evidemment, ce fût le fil rouge de la soirée, évidemment, je n’ai rien fait mais le charmant prêtre a semble-t-il remarqué qu’il était l’objet de nombreux regards. Après nous être renseignés auprès du charmant serveur (l’absorption de vin macédonien semble rendre beaucoup de ces messieurs charmants), non avar en informations en tout genre qu’il était, il semblerait que ce lieu soit une sorte de QG pour les prêtres de la ville, ceux qui aiment sortir, car le propriétaire serait ami avec nombre d’entre eux. Evidemment, Iwona insista pour que je retourne sur les lieux le lendemain soir, afin d’approcher le prêtre biker. Evidemment, je ne le fis pas. J’étais en mode Maman, pas en mode célibataire.
(...)
Lilie
Le lendemain fût un Vendredi noir. Kinderette exprimait sans doute le contrecoup de deux semaines de voyage, et même si j’avais fait attention à ne pas la surmener, à respecter son sommeil, son âge, prendre en compte la chaleur, elle donnait ce jour des signes de fatigue évidente. Après une nuit agitée, nous étions restées tranquillement nous reposer le matin, dans la chambre, entre lessive et jeux pour Kinderette. Une crise de caprices au moment où nous sortions nous balader en ville pour la première fois le midi nous avait ramenées dans notre chambre, où Kinderette, vexée, n’avait pas voulu siester, ce qui n’arrangea pas les choses. Elle finit par s’endormir vers 16h, ce qui ne fît qu’ajouter à ma frustration d’une journée gâchée, d’autant plus qu’à ce même moment, Ben et Iwona, amis Anglos-polonais de mon époque dublinoise, en road trip dans les Balkans et qui avaient fait un détour par Bitola spécialement pour nous voir, venaient d’arriver en ville d’où il repartiraient le lendemain matin. Le temps de repos de Kinderette me permit de prendre du recul sur la situation. Certes, une journée enfermée dans une chambre sur deux semaines de voyage, c’est frustrant, mais cela fait aussi partie du voyage, les coups de fatigue, les baisses de moral, pour moi, comme pour ma fille.
A son réveil, nous faisions table rase de la journée, et conclûmes un pacte de bonne humeur, bien décidées à passer un bon moment en ville, en compagnie de Ben et Iwona que nous étions toutes deux ravies de retrouver depuis Lublin en Pologne, où nous les avions laissés un an plus tôt.
C’est en terrasse autour de verres de vins macédoniens que nous retrouvions nos deux épicuriens voyageurs qui arrivaient de Skopje, halte que je leur avais tuyautée et dont ils avaient évidemment adoré la démesure.
Nous nous dirigeâmes ensuite vers un bar original, à l’image du propriétaire des lieux qui a créé dans cet endroit un véritable musée où l’on peut déguster du vin macédonien sur le plus vieux piano de la ville, éclairé par un lustre en véritables chapeaux de broderie ancienne, tout en contemplant un énorme sablier de la hauteur de la salle en sous-sol, sablier qui ne fonctionne pas car « quand on entre ici, le temps s’arrête », dixit le charmant serveur qui se transforma le temps de dix minutes en guide privé pour les joyeux curieux que nous étions.
Nous avions commencé notre moment en ce lieu sur sa terrasse extérieure, près de la fontaine de la place où débouche la rue piétonne, unique artère pseudo-touristique de la ville où j’ai d’ailleurs eu bien du mal à trouver une carte postale. Sur cette terrasse blindée de monde, comme toutes les autres de la ville d’ailleurs, il faisait encore très chaud ce jour-là, et Ben, Iwona et moi fûmes tous trois surpris de voir s’installer sur une table voisine, un prêtre orthodoxe, avec sa pint de bière. Quadra brun et barbu d’allure biker et rocker, il venait rejoindre un couple trentenaire et ils avaient l’air de bien s’amuser. Je bavais sur lui, et Ben et Iwona en plaisantaient. Il faut dire que c’était physiquement tout à fait mon genre d’homme, l’aube de prêtre en moins. J’ai failli m’étouffer d’un délicieux tapas local que nous étions en train de déguster, quand un second prêtre, plus jeune, blond vénicien et imberbe est arrivé... et que je découvrais qu’il tenait par la main la jolie jeune fille qui était à ses côtés. Ben mince alors ! Les prêtres orthodoxes peuvent se marier ? Ca me les rendait tout de suite plus sympathique, surtout son copain barbu qui était assis à quelques mètres de mois, et lui, sans aucune compagnie féminine !... Evidemment, ce fût le fil rouge de la soirée, évidemment, je n’ai rien fait mais le charmant prêtre a semble-t-il remarqué qu’il était l’objet de nombreux regards. Après nous être renseignés auprès du charmant serveur (l’absorption de vin macédonien semble rendre beaucoup de ces messieurs charmants), non avar en informations en tout genre qu’il était, il semblerait que ce lieu soit une sorte de QG pour les prêtres de la ville, ceux qui aiment sortir, car le propriétaire serait ami avec nombre d’entre eux. Evidemment, Iwona insista pour que je retourne sur les lieux le lendemain soir, afin d’approcher le prêtre biker. Evidemment, je ne le fis pas. J’étais en mode Maman, pas en mode célibataire.
(...)
Lilie
mamina- Localisation : Près de Pau, sur le chemin de St Jacques...
- Message n°93
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Skyrgamur- Localisation : Normandie
- Message n°94
Re: Carnets de Macédoine (2017)
???Lilie a écrit:Je ne le savais pas, mais ces mots étaient les derniers que j’écrivais de mon carnet de voyage macédonien.
_________________
Skyrgamur, le lutin Islandais
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°95
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Skyrgamur a écrit:???Lilie a écrit:Je ne le savais pas, mais ces mots étaient les derniers que j’écrivais de mon carnet de voyage macédonien.
Je te laisse relire le message n°17, Skyr.
"Carnets de Macédoine", ce sont mon carnet de voyage+le carnet de voyage de Kinderette+mon carnet de maison... chacun ici avec son code couleur.
Lilie
Skyrgamur- Localisation : Normandie
- Message n°96
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Je croyais que tu t'étais fait enlever par le beau prêtre.
_________________
Skyrgamur, le lutin Islandais
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°97
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Si seulement !
Lilie
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°98
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Le lendemain matin était une journée très chaude, la plus chaude que nous avions eue depuis Skopje. Il ne faisait pas bon sortir dans les rues, et je l’ai compris à mes dépends. Kinderette avait passé une bonne partie de la matinée à jouer avec Kaïa et Vania, les petits enfants de Betty, principalement avec des bombes à eau que Betty faisait inlassablement avec de petits ballons de baudruche, à la demande expresse de son petit fils ou de sa petite fille. Michelangelo, le fils de Betty et de Kiril m’avait parlé du bazar de Bitola. Que c’est là que les habitants de la ville achetaient leurs fruits et légumes, directement aux producteurs, moins chers et bien meilleurs que dans les magasins. J’avais décidé d’aller le découvrir, et d’en ramener quelques fruits, une pastèque au moins. Le bon kilomètre et demi pour nous y rendre fût déjà difficilement supportable tant la chaleur était accablante. Nous approchions du milieu de journée, et des quarante degrés. L’air était sec et nous cherchions l’ombre et les brumisateurs des terrasses couvertes le long de la rue piétonne. Dans le dédale ombragé des rues étroites et biscornues qui forment l’entrée du bazar et mènent au marché central, Kinderette comme moi oubliions la chaleur, la plus jeune obnubilée par la fraîche (et rafraîchissante) promesse d’y trouver des ballons gonflables à remplir d’eau et à partager avec ses nouveaux copains, la seconde que j’étais par la découverte insoupçonnée de ce charmant quartier de la ville qui résonnait encore des affaires négociées ici depuis des siècles certainement, je le devinais aisément. De boutiques de jeux bons marchés pour enfants à la mercerie en passant par le barbier, on y trouvait ici toutes sortes de choses, et ces courtes rues menaient toutes au centre névralgique du bazar : le marché couvert alimentaire. On y trouvait ici des dizaines de producteurs de choux, de paprikas verts, de paprikas rouges, de paprikas longs, de paprikas courts, de melons, de pêches, d’oignons, d’olives, de pommes de terre ou de pastèques. Je m’arrêtai devant l’étale d’un marchand qui m’avait l’air sympathique derrière sa grosse moustache brune. Il l’était, et après un échange de gestes et de mots dans la langue universelle des hommes, je repartis allégée de 4 euros et avec une pastèque de neuf kilos dans les bras.
- Des fois, ce serait bien d’utiliser mon cerveau !
me disais-je déjà au bout d’une cinquantaine de mètres, lorsque les bras douloureux et les gouttes de sueur coulant simultanément entre mes seins et dans mon dos me rappelèrent que j’avais encore environs un kilomètre quatre cent cinquante à parcourir ainsi sous quarante degrés, au milieu de la circulation d’une ville, ma fille de six ans dont je ne pouvais tenir la main à mes côtés.
C’est à peu près au même moment que je décidai de trouver un boui-boui où nous poser et déjeuner, boui-boui qui devait évidemment proposer de la bière comme rafraîchissement pour porteuses de pastèques. Je tenais à rester dans l’atmosphère du bazar, pas dans celle du centre-ville et je trouvai donc au détour d’une rue calme et sans boutique, le boui-boui que je cherchais : trois tables en intérieur, deux sur rue, et une carte plus que succincte. Une salade de crudités faite sur mesure pour nous rassasier et une pinte en bouteille de ces bières macédoniennes qui ne brillent par leurs qualités gustatives mais qui ont le mérite, si servies fraîches, de satisfaire les assoiffés.
(...)
Lilie
- Des fois, ce serait bien d’utiliser mon cerveau !
me disais-je déjà au bout d’une cinquantaine de mètres, lorsque les bras douloureux et les gouttes de sueur coulant simultanément entre mes seins et dans mon dos me rappelèrent que j’avais encore environs un kilomètre quatre cent cinquante à parcourir ainsi sous quarante degrés, au milieu de la circulation d’une ville, ma fille de six ans dont je ne pouvais tenir la main à mes côtés.
C’est à peu près au même moment que je décidai de trouver un boui-boui où nous poser et déjeuner, boui-boui qui devait évidemment proposer de la bière comme rafraîchissement pour porteuses de pastèques. Je tenais à rester dans l’atmosphère du bazar, pas dans celle du centre-ville et je trouvai donc au détour d’une rue calme et sans boutique, le boui-boui que je cherchais : trois tables en intérieur, deux sur rue, et une carte plus que succincte. Une salade de crudités faite sur mesure pour nous rassasier et une pinte en bouteille de ces bières macédoniennes qui ne brillent par leurs qualités gustatives mais qui ont le mérite, si servies fraîches, de satisfaire les assoiffés.
(...)
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°99
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Mes bras se souvinrent pendant quarante huit heures encore du kilomètre et demi passé à porter les neuf kilos de pastèque à travers la ville. Kinderette passa le reste de la journée à l’ombre du jardin, avec Kaïa et Vania, à s’éclabousser de rires et d’eau fraîche. J’avais d’abord eu envie de retourner faire de la photo en soirée, au vieux bazar, mais Kinderette s’amusait bien ici, et puis il faisait chaud, la chaleur l’épuisait, et moi j’étais en bonne compagnie, avec Betty, Kiril et le reste de la famille qui se succédait sous la tonnelle pour me raconter leur ville, leurs vies, et leur pays.
Moi qui ne m’étais auparavant jamais intéressée à ce petit pays, j’apprenais ce jour-là que les relations avec la Grèce, le grand pays voisin, étaient compliquées. Kiril, l’équivalent local du « Cyril » francisé et très populaire prénom sur la terre de celui qui y développa l’alphabet au Xe siècle, m’avoua même que pour lui, la Grèce, c’était leur principal problème. Eux, les Macédoniens, ils ne demandaient rien. Juste qu’on les laisse tranquilles, chez eux.
- On ne veut rien, on ne demande rien. Mais tous les pays qui nous entourent veulent nous récupérer ! me lança Betty, plus tard.
- Quand on passe la frontière grèce, et qu’on vient de Macédoine, les douaniers cachent les initiales de la Macédoine sur nos voitures. Ils refusent de nous reconnaître comme pays. Ils veulent qu’on change notre nom. On a déjà changé notre drapeau à cause d’eux. Et le seul nom qu’ils ont accepté, le nom officiel, c’est « République Macdédonienne d’Ex Yougoslavie ». Mais ça n’a pas de sens, la Yougoslavie n’existe plus ! Alors même si on s’appelle « Macédoine du Nord » ou autre chose, je ne sais pas ce que ça changera... La Grèce, c’est vraiment notre gros problème ici en Macédoine...
J’ignorais ces conflits. Et alors que je tape ces mots de retour à la maison, la presse française mentionne d’ailleurs ces tensions, le changement de nom demandé par la Grèce depuis des années, leur véto pour laisser entrer la Macédoine dans l’Union Européenne, les négociations en cours... Souvent derrière les tensions entre pays, sous couvert de fausses excuses, se cachent des raisons économiques. La Macédoine n’a pourtant pas accès à la mer, ni de ressources en sous-sol me semble-t-il... Ces querelles modernes ne seraient alors que les conséquences de siècles de conflits successifs sur ces territoires ? Je n’en sais rien... Tout ce que je sais, c’est ce que j’en ai entendu un peu, pendant deux semaines, par quelques Macédoniens.
(...)
Lilie
Moi qui ne m’étais auparavant jamais intéressée à ce petit pays, j’apprenais ce jour-là que les relations avec la Grèce, le grand pays voisin, étaient compliquées. Kiril, l’équivalent local du « Cyril » francisé et très populaire prénom sur la terre de celui qui y développa l’alphabet au Xe siècle, m’avoua même que pour lui, la Grèce, c’était leur principal problème. Eux, les Macédoniens, ils ne demandaient rien. Juste qu’on les laisse tranquilles, chez eux.
- On ne veut rien, on ne demande rien. Mais tous les pays qui nous entourent veulent nous récupérer ! me lança Betty, plus tard.
- Quand on passe la frontière grèce, et qu’on vient de Macédoine, les douaniers cachent les initiales de la Macédoine sur nos voitures. Ils refusent de nous reconnaître comme pays. Ils veulent qu’on change notre nom. On a déjà changé notre drapeau à cause d’eux. Et le seul nom qu’ils ont accepté, le nom officiel, c’est « République Macdédonienne d’Ex Yougoslavie ». Mais ça n’a pas de sens, la Yougoslavie n’existe plus ! Alors même si on s’appelle « Macédoine du Nord » ou autre chose, je ne sais pas ce que ça changera... La Grèce, c’est vraiment notre gros problème ici en Macédoine...
J’ignorais ces conflits. Et alors que je tape ces mots de retour à la maison, la presse française mentionne d’ailleurs ces tensions, le changement de nom demandé par la Grèce depuis des années, leur véto pour laisser entrer la Macédoine dans l’Union Européenne, les négociations en cours... Souvent derrière les tensions entre pays, sous couvert de fausses excuses, se cachent des raisons économiques. La Macédoine n’a pourtant pas accès à la mer, ni de ressources en sous-sol me semble-t-il... Ces querelles modernes ne seraient alors que les conséquences de siècles de conflits successifs sur ces territoires ? Je n’en sais rien... Tout ce que je sais, c’est ce que j’en ai entendu un peu, pendant deux semaines, par quelques Macédoniens.
(...)
Lilie
Lilie- Localisation : Pieds sur Terre, tête en l'Eire
- Message n°100
Re: Carnets de Macédoine (2017)
Pelister National Park.
A Ohrid quelques jours plus tôt, j’étais tombée sans chercher sur une carte détaillée du Pelister National Parc, le troisième et dernier parc national du pays, aux portes de Bitola. En constatant que ces montagnes touchaient la ville, je n’avais depuis plus qu’une seule idée en tête : y passer une journée à randonner avec Kinderette, une vraie belle journée de marche dans les montagnes macédoniennes ! Nous n’avions plus que la journée du Dimanche, notre dernière journée complète en Macédoine puisque nous prendrions le bus le lendemain pour retourner en Bulgarie, ou un avion trop matinal nous envolerait vers la France le Mardi matin. Betty et d’autres sources m’avaient appris qu’il n’existait aucun bus pour s’y rendre et que ma seule solution, c’était un taxi, pour quelques centaines de Denars. Ca m’allait. J’avais passé du temps sur ma carte, à étudier la meilleure option. Kiril m’avait confortée sur le point de départ, un hôtel au coeur du parc national, le seul encore ouvert et fréquenté, d’où partait plusieurs randonnées dont celle qui menait au point culminant du parc, le Mont Pelister, à 2600 mètres d’altitude, le deuxième sommet du pays.
Il était vers 9h30 en ce Dimanche matin lorsque le taxi nous a déposées sur le vaste parking de l’hôtel, à 1400 mètres d’altitude, et que l’on atteint par une interminable route en lacets qui commence peu après la sortie de la ville, située elle à 600 mètres d’altitude. Alors que nous étions en train de déchiffrer le panneau informatif montrant différents circuits balisés sur une carte, un couple quarantenaire et leur ado d’âge avancé se sont approchés pour en faire de même. Nous avons échangé quelques mots. Ils étaient Belges, côté flamants, et paraissaient volontiers plus à l’aise avec l’Anglais qu’avec le Français. Ils voulaient grimper jusqu’en haut du Mont Pelister. Moi, je n’avais aucune ambition ni attente, j’étais ici avec Kinderette, et je suivrais son allure et ses envies. J’avais juste envie de profiter des montagnes, du grand air, et de marcher un peu et puis Inch Allah ! Je n’arrivais pas à faire le parallèle entre le panneau et la carte que j’avais dans les mains. Eux, avait sur une feuille A4 une carte qui semblait bien plus juste que la mienne au 1 :50 000, dont je compris au fil de la journée l’obsolescence des parcours et l’approximative justesse. Le jeune homme semblait sûr de lui, et décida pour leur trio de la voie à suivre, la Blue Track. Nous suivrions la même, après tout. Entre temps, Kinderette et la mère de famille avaient déjà sympathisé, elle s’appelait Martine, et quand ils partirent devant nous, elles se promirent de se voir plus tard. Après une petite demi-heure d’ascension en forêt où l’allure de Kinderette nous avait déjà permis, à ma grande surprise, de passer devant une famille avec deux enfants et un couple de séniors, nous atteignirent un premier petit sommet, où quelques ruines en béton, de vieilles tables de pique-nique et une ligne de remontées mécaniques étaient les seules choses que l’on pouvait apercevoir réellement. Nous y retrouvâmes nos amis belges, échangions de nouveau sur l’itinéraire, et repartîmes ensemble, eux devant car je ne voulais pas que notre rythme plus lent les gêne. Plus lent, c’était en fait sur le court terme. Car Knderette qui gambadait tout sourire n’avait en fait pas besoin de s’arrêter, alors que nos compagnons, eux, semblaient s’arrêter bien plus souvent. De fait, nous les retrouvions souvent. Et quand Kinderette ramassa ses premières et rares fraises sauvages, s’est en criant le prénom de Martine qu’elle partie en courant devant moi, offrir son butin à sa nouvelle copine. Parfois, quand nous ne les voyions plus depuis un moment, Kinderette s’écriait « Helloooo ! » et nous recevions un « Helloooo ! » en retour.
Nous les rejoignimes au niveau d’un petit ruisseau à partir duquel nous entamions la montée par un pierrier sur le flanc d’une autre montagne, avant de regagner le sentier à travers la forêt. Martine, son mari Hank, et Niel, leur fils, étaient repartis devant nous. Nous suivions toujours l’un des marquages, mais plus celui de la Blue track. Je trouvais cela bizarre car je n’avais pas l’impression d’avoir manqué une sente, mais puisque mon intention était simplement de marcher, et non d’atteindre une destination, et puisque je suivais toujours un sentier balisé, et puisque Kinderette était toujours enjouée et ravie d’être là, et bien je continuais mon chemin en toute quiétude. Nous avions laissé le ruisseau depuis une trentaine de minutes lorsque nous rejoignîmes la famille belge là où le chemin se séparait en deux. Neil était formel : nous n’étions plus sur la Blue track qui devait les mener au sommet du Pelister, mais ni eux, ni moi n’avions vu la bifurcation qui avait du s’opérer au niveau du ruisseau. Tant pis, sur sa carte, Neil voyait que le sentier que nous suivions pouvait nous emmener à un autre sommet. C’est tout naturellement que nous leur avons emboîté le pas, et que nous les avons rejoint plus loin, là où le paysage se dévoilait sur 180 degrés, un promontoire qui dominait toute la vallée et au loin sur notre gauche, Bitola et la plaine qui s’étendait encore loin derrière. Nous avons fait une longue pause ici tous ensemble, la première vraiment pour Kinderette depuis notre départ du parking. Un panneau fléchait le sommet Crevna Stena à 30 minutes de marche. Nullement indiqué sur ma carte que j’avais abandonnée déjà mais qui le fût davantage encore pour le reste de la journée. Celle de Neil le cartographiait à 2100 mètres d’altitude, et nous étions déjà à environs 1800 mètres. J’observais Kinderette, elle ne semblait pas gênée par l’altitude, ni dans sa respiration, ni dans son énergie. Je lui proposai si elle souhaitait continuer tout en haut de la montagne, ou si elle souhaitait redescendre.
- Non ! Moi je veux aller voir la vue tout en haut de la montagne !
A croire que celle que nous avions déjà ne lui suffisait pas... Et bien, s’était reparti !
(...)
Lilie
A Ohrid quelques jours plus tôt, j’étais tombée sans chercher sur une carte détaillée du Pelister National Parc, le troisième et dernier parc national du pays, aux portes de Bitola. En constatant que ces montagnes touchaient la ville, je n’avais depuis plus qu’une seule idée en tête : y passer une journée à randonner avec Kinderette, une vraie belle journée de marche dans les montagnes macédoniennes ! Nous n’avions plus que la journée du Dimanche, notre dernière journée complète en Macédoine puisque nous prendrions le bus le lendemain pour retourner en Bulgarie, ou un avion trop matinal nous envolerait vers la France le Mardi matin. Betty et d’autres sources m’avaient appris qu’il n’existait aucun bus pour s’y rendre et que ma seule solution, c’était un taxi, pour quelques centaines de Denars. Ca m’allait. J’avais passé du temps sur ma carte, à étudier la meilleure option. Kiril m’avait confortée sur le point de départ, un hôtel au coeur du parc national, le seul encore ouvert et fréquenté, d’où partait plusieurs randonnées dont celle qui menait au point culminant du parc, le Mont Pelister, à 2600 mètres d’altitude, le deuxième sommet du pays.
Il était vers 9h30 en ce Dimanche matin lorsque le taxi nous a déposées sur le vaste parking de l’hôtel, à 1400 mètres d’altitude, et que l’on atteint par une interminable route en lacets qui commence peu après la sortie de la ville, située elle à 600 mètres d’altitude. Alors que nous étions en train de déchiffrer le panneau informatif montrant différents circuits balisés sur une carte, un couple quarantenaire et leur ado d’âge avancé se sont approchés pour en faire de même. Nous avons échangé quelques mots. Ils étaient Belges, côté flamants, et paraissaient volontiers plus à l’aise avec l’Anglais qu’avec le Français. Ils voulaient grimper jusqu’en haut du Mont Pelister. Moi, je n’avais aucune ambition ni attente, j’étais ici avec Kinderette, et je suivrais son allure et ses envies. J’avais juste envie de profiter des montagnes, du grand air, et de marcher un peu et puis Inch Allah ! Je n’arrivais pas à faire le parallèle entre le panneau et la carte que j’avais dans les mains. Eux, avait sur une feuille A4 une carte qui semblait bien plus juste que la mienne au 1 :50 000, dont je compris au fil de la journée l’obsolescence des parcours et l’approximative justesse. Le jeune homme semblait sûr de lui, et décida pour leur trio de la voie à suivre, la Blue Track. Nous suivrions la même, après tout. Entre temps, Kinderette et la mère de famille avaient déjà sympathisé, elle s’appelait Martine, et quand ils partirent devant nous, elles se promirent de se voir plus tard. Après une petite demi-heure d’ascension en forêt où l’allure de Kinderette nous avait déjà permis, à ma grande surprise, de passer devant une famille avec deux enfants et un couple de séniors, nous atteignirent un premier petit sommet, où quelques ruines en béton, de vieilles tables de pique-nique et une ligne de remontées mécaniques étaient les seules choses que l’on pouvait apercevoir réellement. Nous y retrouvâmes nos amis belges, échangions de nouveau sur l’itinéraire, et repartîmes ensemble, eux devant car je ne voulais pas que notre rythme plus lent les gêne. Plus lent, c’était en fait sur le court terme. Car Knderette qui gambadait tout sourire n’avait en fait pas besoin de s’arrêter, alors que nos compagnons, eux, semblaient s’arrêter bien plus souvent. De fait, nous les retrouvions souvent. Et quand Kinderette ramassa ses premières et rares fraises sauvages, s’est en criant le prénom de Martine qu’elle partie en courant devant moi, offrir son butin à sa nouvelle copine. Parfois, quand nous ne les voyions plus depuis un moment, Kinderette s’écriait « Helloooo ! » et nous recevions un « Helloooo ! » en retour.
Nous les rejoignimes au niveau d’un petit ruisseau à partir duquel nous entamions la montée par un pierrier sur le flanc d’une autre montagne, avant de regagner le sentier à travers la forêt. Martine, son mari Hank, et Niel, leur fils, étaient repartis devant nous. Nous suivions toujours l’un des marquages, mais plus celui de la Blue track. Je trouvais cela bizarre car je n’avais pas l’impression d’avoir manqué une sente, mais puisque mon intention était simplement de marcher, et non d’atteindre une destination, et puisque je suivais toujours un sentier balisé, et puisque Kinderette était toujours enjouée et ravie d’être là, et bien je continuais mon chemin en toute quiétude. Nous avions laissé le ruisseau depuis une trentaine de minutes lorsque nous rejoignîmes la famille belge là où le chemin se séparait en deux. Neil était formel : nous n’étions plus sur la Blue track qui devait les mener au sommet du Pelister, mais ni eux, ni moi n’avions vu la bifurcation qui avait du s’opérer au niveau du ruisseau. Tant pis, sur sa carte, Neil voyait que le sentier que nous suivions pouvait nous emmener à un autre sommet. C’est tout naturellement que nous leur avons emboîté le pas, et que nous les avons rejoint plus loin, là où le paysage se dévoilait sur 180 degrés, un promontoire qui dominait toute la vallée et au loin sur notre gauche, Bitola et la plaine qui s’étendait encore loin derrière. Nous avons fait une longue pause ici tous ensemble, la première vraiment pour Kinderette depuis notre départ du parking. Un panneau fléchait le sommet Crevna Stena à 30 minutes de marche. Nullement indiqué sur ma carte que j’avais abandonnée déjà mais qui le fût davantage encore pour le reste de la journée. Celle de Neil le cartographiait à 2100 mètres d’altitude, et nous étions déjà à environs 1800 mètres. J’observais Kinderette, elle ne semblait pas gênée par l’altitude, ni dans sa respiration, ni dans son énergie. Je lui proposai si elle souhaitait continuer tout en haut de la montagne, ou si elle souhaitait redescendre.
- Non ! Moi je veux aller voir la vue tout en haut de la montagne !
A croire que celle que nous avions déjà ne lui suffisait pas... Et bien, s’était reparti !
(...)
Lilie
Dernière édition par Lilie le Mer 23 Aoû - 21:43, édité 5 fois (Raison : Les fautes!!!)