Escapade Capverdienne

A l'hôtel, minibus et groupe nous attendent pour le transfert vers l'hôtel suivant. Nous repassons par Ribeira Grande pour nous enfiler dans sa vallée, plus large mais aux contours déchiquetés comme les précédentes. La grimpette est de courte durée mais avec quelques raidillons au pourcentage impressionnant avant l'arrivée à notre hôtel : Pedracin Village. Au milieu des cultures en terrasses et hauts palmiers s'éparpillent des maisons de pierres et toit de paille traditionnelles abritant nos chambres. Le bâtiment d'accueil et de restauration côtoie la piscine - dont nous ne profiterons guère - au milieu des lauriers, bougainvilliers et autres flamboyants.

Après la douche je m'écrase dans une sieste.
La fin de journée au bord de la piscine nous frigorifie par ce temps nuageux et surtout venteux. Un apéro au grogue et vin locaux s'impose pour nous réchauffer avant le diner au buffet garni de spécialités locales.
Même en ayant l'impression de faire trainer le diner en papotages, le coucher sera à peine plus tardif que la veille.

Jour 5

Ce matin le ciel est bas et l'atmosphère bien humide. Il bruine même. Cela ne nous arrête pas et, hormis nos deux blessés qui s'offrent une journée de farniente, nous repartons à l'assaut de routes-ruelles pavées, de sentiers de terre et de roches au milieu de cultures en terrasse.
Champs de canne, fruitiers et petites chaumières dispersées rythment la marche qui nous fait passer d'un versant à l'autre, empruntant par moment les levadas, ces canaux typiques de la vallée de Chã de Peidras bien verte (ici des sources alimentent en permanence les coteaux).

Ce midi encore, une famille nous accueille sur la terrasse de sa maison colorée et fleurie et nous régale.

A chaque jour ses petites découvertes ; aujourd'hui c'est un extracteur de jus de canne à sucre, un alambic à grogue et un moulin à vent.
Tatiana me fait réviser nos apprentissages agricoles et floraux du début de semaine... avec peu de succès, il faut bien l'avouer. Avocatier aux fruits de la taille d'olives, papayers et goyaviers, figuiers de Siccomore... je mélange tout. Par contre, je distingue maintenant très bien l'igname les pieds dans l'eau des arbustes de manioc. Dans l'assiette, c'est moins évident... et c'est tout aussi bon !

La fin d'après-midi au bord de la piscine, agitée d'enfants capverdiens en vacances ici, est moins humide, plus lumineuse sans pour autant être ensoleillée, et moins ventée donc moins froide que la veille. Au chant du paon, "Léon ! Léon !", je farniente et mets à jour ce carnet.

C'était notre dernière journée de rando, notre dernier jour sur Santo Antão ; demain nous retournons à Mindelo sur Saõ Vicente. Mais pour l'heure, l'apéro m'appelle ! Je n'aurais jamais autant bu de rhum qu'au cours de ce voyage...

Vendredi Saint et culture catholique obligent, c'est poisson au menu ce soir, et ce n'est pas pour me déplaire. Délicieux et délicieusement accompagné de riz aux fruits de mer... et des légumes locaux.
Comme la veille, les papotages ne nous retiennent guère tardivement et malgré la fiesta qui bat son plein au village d'en-dessous, je ne tarde pas à m'endormir. Moi qui avais des problèmes d'insomnies et de nuits compliquées avant ce voyage...

Jour 6

Le réveil ce matin est plus énergique : à 7 heures, il faut être prêts pour un petit-déjeuner express, sacs bouclés et rassemblés. Le minibus démarre pile à l'heure prévue, 15 minutes plus tard, pour une longue et belle route à travers l'île pour rejoindre Porto Novo et notre navette maritime.

Après la descente sur Ribeira Grande et la côte, le minibus entame la longue montée qui serpente à flancs de coteaux abrupts, puis surfe sur les crêtes, au grand désespoir de nos vertigineux, entre à-pics et pitons rocheux, comme pour aller flirter avec les nuages qui titillent encore les plus hauts sommets dans ce ciel bleu et ensoleillé retrouvé.
La plongée du regard sur la côte déchiquetée battue par les vagues ou les enfilades verticales de sommets bruns est tout aussi grandiose qu'est admiration le sentiment éprouvé à emprunter cette route pavée construite à mains d'hommes en une quinzaine d'années.
Sur les plus hautes altitudes atteintes ce jour vers 1500 mètres, nous traversons une forêt de conifères, mimosas et eucalyptus surprenante par sa différence avec les arbres côtoyés les jours précédents.
Nous plongeons ensuite de l'autre côté, versant sud, en dépassant un ancien cratère maintenant cultivé, puis dans un beau zigzag nous permettant d'apprécier la vue sur ces terres arides et plus colorées, le petit village et son port, la bande océanique, l'île voisine qui nous attend.




Nous arrivons juste à temps pour grimper dans le ferry qui ne tarde pas à partir pour cette deuxième traversée, nez au vent, face au soleil, les yeux avides d'océan, de vagues, de poissons volants, et qui sait, peut-être de baleines ou de dauphins...


De Porto Novo (Santo Antão)........................................................................................... à Mindelo (São Vicente)


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A peine débarqués, nous abandonnons notre barda qui rejoindra seul l'hôtel pour une virée pédestre à la découverte de la ville colorée et animée en ce Samedi Saint.
Les marchés sont vivants, bien achalandés, aux effluves marquées et alléchantes. La pêche du jour semble encore vivante, les employés de la mairie très habiles pour écailler, vider et préparer les achats des clients. Les étals débordent de fruits, légumes et herbes colorés. Plus loin, les fripes en provenance d'Afrique et des "vieux continents" éclaboussent aussi de leurs couleurs.
Weekend pascal obligé, il nous faut régler maintenant nos achats de souvenirs dans les boutiques d'artisanat avant qu'elles ne baissent le rideau.

Oui, aussi surprenant que cela paraisse, et cela nous a nous aussi beaucoup surpris en l'apprenant, c'est la mairie de Mindelo qui embauche les "poissonniers" qui préparent les poissons achetés par les clients aux pêcheurs ou vendeur de la coopérative.
Tu choisis ton poisson sur l'étal, le vendeur le confie au poissonnier payé par la mairie, qui te le prépare et te le délivre, sans frais supplémentaire.
Et les poissonniers sont une vingtaine alignés sur 2 rangs à débiter les poiscailles avec un geste vif, efficace et une cadence assez impressionnante.

(Malheureusement, j'ai eu quelques problèmes de carte mémoire sur ce voyage et la petite vidéo de cette joyeuse équipe fait partie des pertes.)

Après un déjeuner dans une cafétéria locale très fréquentée par les insulaires, nous grimpons de rues en ruelles jusqu'à notre hôtel tout aussi luxueux que les précédents, et camp de base de notre agence réceptive.
Alors que la ville et l'après-midi s'offrent à nous, nous jouons les sédentaires dans les chambres de béton brut et bois, les terrasses de bois et leurs hamacs, le bassin de nage, la terrasse-café. La sieste est bonne, la farniente de rigueur, les quelques brasses délassantes.
Le rhum coule à flot à l'heure de l'apéro au coucher du soleil qui dore la ville haute et son chapelet de petits cubes colorés.

Au petit restaurant voisin, nous sommes accueillis et nourris encore une fois comme des princes à des tarifs plus que raisonnables. Un groupe d'enfants fait le spectacle pour notre et leur plaisir dans la ruelle sur laquelle donne la fenêtre au bout de notre tablée.
Ce soir, il faut néanmoins vite terminer nos desserts pour descendre assister à un concert municipal de musique capverdienne dans le cadre du 200ème anniversaire de Mindelo. Une belle opportunité repérée et proposée par notre guide. Morna et bossa nova pour nous bercer avec des artistes dont certains ont une renommée internationale (parait-il).

Tard, nous remontons nous coucher en traversant une ville à la fois calme et en fête. Certaines rues chantent et dansent au seuil des bars, d'autres sont désertes mais pas effrayantes.

Jour 7

Ce matin, nous partons à la découverte du sud de l'île de São Vicente, encore plus sèche que sa consœur précédemment arpentée, et moins accidentée. Le minibus file sur la route pavée entre les reliefs qui me font penser à ceux du Maroc  ou de l'Adrar mauritanien. Et, ô surprise, surgit de la même façon, en fond de vallée, une oasis de palmiers accompagnés de quelques cultures, quelques paillotes et maisons-cubes colorées, des petits moulins...


Au bout, nous atteignons la côte face à l'île-réserve de Santa Luzia, toute aussi accidentée et désertique que ses grandes sœurs du nord.
Le village de pêcheurs de Calhau est désert en ce matin de Pâques. Nous le traversons avant de nous engager sur un pseudo-chemin qui grimpe au petit col le surplombant. Sous nos pieds, du gravier volcanique noir et léger qui roule et crisse. Au fur et à mesure que nous nous élevons sur cette colline volcanique, le panorama se bonifie : les contreforts du volcan Viana, l'île voisine de Santa Luzia, la baie au fond de laquelle le village coloré de Calhau repose...

La bascule de l'autre côté du col nous mène vers une nouvelle expérience. Sur une coulée de lave frippée noire d'où percent des buissons improbables, nous redescendons vers la côte ébène balayée de bleu intense et d'écume. Le vent nous apporte senteurs iodées et embruns salés.
A quelques mètres des flots qui se fracassent en puissance et bruyamment sur les roches, nous profitons tous de cette énergie océanique qui nous fouette, nous enveloppe, nous dynamise. Quelques pêcheurs à la ligne aux belles prise sont une autre source d'intérêt.

Nous longeons cette côte pour atteindre une tâche de sable blond sur laquelle s'égayent quelques locaux : la plage de Praia Grande. C'est un appel à la baignade auquel nous ne pouvons malheureusement répondre. La chaleur se fait plus ressentir, les godillots se mettent à trainer sur le sentier de poussière brune qui nous ramène à Calhau où un véritable Bagdad Café nous attend pour le déjeuner. Désert, il ne le restera guère, peu à peu envahi de locaux de Mindelo de sortie et du groupe d'Espagnols qui nous suit ou presque depuis le début de semaine.
Au menu, pléthore de poissons délicieux accompagnés de riz, frites, légumes locaux... L'ambiance monte d'un cran dans la chaleur étouffante avec les notes capverdiennes de la chanteuse qui s'est installée.
Pour autant, nous cédons la place à ceux qui arrivent encore, à presque 14 heures, pour rentrer à Mindelo où une sieste est bienvenue pour nombre d'entre nous.

En fin d'après-midi je fais partie du petit groupe qui repart à l'assaut des rues brûlantes et désertes de la ville pour quelques clichés complémentaires et surtout l'exposition dédiée à l'art capverdien et africain.
Magnifique collection de peintures contemporaines capverdiennes, mais surtout de masques et objets décoratifs du Gabon, Cameroun, Guinée, côte d'Ivoire et Mali. Je retrouve avec plaisir ces traits, ces figures, ce style dogon, souvenirs d'un autre voyage qui reste comme une expérience particulière au milieu de mes finalement nombreuses pérégrinations (au regard de mes compagnons néophytes ou presque de voyages).
Les rues colorées au style colonial marqué sont désertes, tout est fermé, il fait chaud.
Nous ne trainons guère et rentrons nous rafraichir sur la terrasse-café ventée et de rhum garnie.

Tatiana nous ramène avec plaisir dans notre tout premier restaurant capverdien, une valeur sûre que nous lui avons redemandée pour cette dernière soirée de bombance, de musique et de danses à la fois nostalgiques et rythmées.

Jour 8

Haaa ces groupes (de Français) qui se croient seuls en vacances et à l'hôtel !... A 5h30 ils ont pris congé de l'hôtel, sans aucune pensée pour ceux qui dormaient juste au-dessus... Bref, réveil tôtif désagréable, heureusement compensé par le dernier petit-déjeuner 5 étoiles tout en lenteur dans la tiédeur matinale.
Je boucle les sacs et descends rapidement en ville acheter les cartes postales qui me manquaient, puis enfile à regret la tenue de voyage : adieu pantacourt et sandales, bonjour bas de contention et baskets...
En milieu de matinée nous partons pour l'aéroport en retraversant la ville colorée et ses faubourgs arides.
L'A320 de la TAP atterrit, décharge ses passagers et bagages en provenance d'Europe sur le tarmac pour nous ré-embarquer dans la foulée.

Rangée 12, milieu d'aéronef, hublot d'issue de secours. C'est à la fois top car interdit de garder sac aux pieds (alors que c'est obligatoire pour les autres) et espace plus large pour étendre les jambes... Et en même temps, l'explication des manipulations qui me seront demandées en cas d'urgence me met un petit coup de stress, moi qui n'aie pourtant pas peur de l'avion...

4h30 plus tard, après deux ou trois cercles au-dessus et dans la ouate, nous atterrissons à Lisbonne, sous la pluie et à peine 15 degrés. Cela ne donne pas envie de rentrer !
J'ai 3 heures de transit, tout le temps de prendre le temps de boucler ce carnet, de commander mon taxi-frérot à l'arrivée, grignoter un morceau et arpenter en long et en large la "connecting flights zone". Dans 5 heures, je dormirai dans mon lit au Wapchalet, inch'Allah !